Je lis ce matin sur @si que le matinaute est désemparé face à la décision de l’Autorité des marchés financiers (AMF) qui a estimé hier qu’il n’y avait pas de manquement d’initié dans l’affaire EADS. Et celui-ci s’interroge au passage sur l’utilisation du terme « manquement d’initié » au lieu de « délit d’initié ». Il y a de quoi en effet être interpellé par cet étrange glissement de vocabulaire. En réalité, l’explication est purement technique. Il existe en droit boursier trois infractions particulièrement graves qui relèvent d’un double régime répressif : le manquement (ou délit) d’initié, la fausse information financière et la manipulation de cours. Les auteurs de ces infractions encourent d’une part une sanction administrative, prononcée par le gendarme boursier et, d’autre part, une sanction pénale. Pourquoi ? Parce que de tels faits violent à la fois le règlement général de l’AMF (la loi des marchés financiers) et la loi pénale. Dans le premier cas, on parle de « manquement d’initié » parce que c’est le terme exact utilisé dans le règlement, dans le second de « délit d’initié », vocabulaire employé pour désigner l’infraction pénale. Comme il s’agit ici d’une décision de l’AMF, c’est bien le terme de « manquement d’initié » qui est le bon. Il ne s’agit pas d’une pudeur de vocabulaire ou d’un euphémisme à vocation diplomatique.
Comment ça marche l’AMF ?
Voyons maintenant rapidement la décision qui est ici. D’abord, je vous invite à jeter un coup d’oeil sur la présentation des parties en tête de document. Nous avons là le gratin des avocats d’affaires parisien, le must absolu de l’expertise juridique française dans cette matière hautement ardue qu’est le droit boursier. S’il advenait qu’un jour vous soyez poursuivi pour délit d’initié, vous pouvez puiser dans la liste les yeux fermés. Ne souriez pas. N’importe qui peut se retrouver un jour détenteur d’une information et être tenté de l’utiliser pour investir. Il n’y a pas que les financiers qui soient dans ce cas, même s’ils ont plus de chances d’accéder à ce type d’information. Plus sérieusement, quelques mots sur la manière dont l’AMF fonctionne. Celle-ci dispose d’outils très sophistiqués pour étudier les mouvements de titres sur les marchés. C’est ainsi qu’en mars 2006, l’AMF constate de nombreuses cessions de titres EADS consécutives à des levées d’option opérées par certains dirigeants d’EADS. Puis, le 4 avril, Lagardère et Daimler cèdent 7,5% du capital d’EADS. A l’AMF, ces interventions dans le même sens de gens à la tête du groupe et d’actionnaires importants déclenchent le soupçon. Le secrétaire général de l’AMF décide alors le 22 mai d’ouvrir une enquête. Puis le 13 juin, le groupe annonce le retard de livraison de l’Airbus A380 et publie un avertissement sur résultats, autrement dit un signal sur le fait que les prévisions seront moins bonnes que prévues initialement. Le lendemain, le cours chute de 26% et le secrétaire général étend l’enquête à l’information financière publiée par le groupe. Une société cotée est en effet tenue de fournir une information exacte au marché et de signaler surtout au plus vite tout événement susceptible d’avoir un impact sur le cours. Or, à première vue, les cessions importantes de titres intervenues en mars et avril peuvent laisser penser que les auteurs de ces transactions détenaient des informations qu’ils n’ont pas transmises au marché. Le soupçon est renforcé par les annonces du 13 juin sur les retards de livraison et l’impact prévisible sur les résultats. Vous observerez à ce stade que l’AMF joue son rôle de gardien des marchés, y compris sur les poids lourds de la cote. Il faut savoir que les inspecteurs de l’AMF ne sont pas des tendres. Quand ils s’attaquent à un groupe, si important soit-il, ils ne lâchent rien. Réflexe naturel de l’enquêteur qui constate une situation douteuse et n’a de cesse d’identifier les coupables.
Au terme de l’enquête, la direction de l’AMF (on dit le collège) a le choix, au vu des résultats des investigations réalisées entre abandonner la procédure parce que le dossier est vide, ou bien transmettre celui-ci à la commission des sanctions, un organe distinct de la direction de l’AMF, présidé par un conseiller d’Etat et composé de magistrats et de professionnels des marchés. Ici, le dossier a donc été transmis parce qu’il était jugé suffisamment probant. Ce qui ne signifie pas que les personnes en cause sont coupables, mais simplement que les charges sont solides. L’affaire est alors instruite par un rapporteur qui entend les « accusés », leurs avocats, peut éventuellement auditionner des témoins etc. Lorsqu’il estime avoir achevé son travail, la commission se réunit et l’affaire est examinée un peu comme devant un tribunal. C’est le résultat de cette procédure qui vient d’être publié et qui conclut à l’innocence des mis en cause.
Scandale, me direz-vous ! C’est aussi ce que j’ai songé en entendant la nouvelle. Des ventes massives de titres par des dirigeants de l’entreprise concernée et des actionnaires quelques semaines avant l’annonce au marché d’événements de nature à faire chuter le titre, ça interpelle forcément. Mais tous les avocats du monde vous diront qu’on ne condamne pas sur des apparences. Or, quand on lit la décision, on observe sans surprise que la querelle juridique de haute voltige qui s’est menée ces derniers mois entre l’AMF et le gratin du barreau d’affaires parisien s’est soldé par un KO debout pour le régulateur.
Passons sur les querelles de procédure – tout à fait passionnantes mais qui pourraient vite vous faire bailler – qui occupent les 17 premières pages et ont toutes été rejetées par la commission des sanctions de l’AMF pour nous concentrer sur les accusations de fond.
Première accusation : la différence entre le plan d’affaire 2006-2008/2010 d’EADS et les attentes du marché serait constitutif d’une information privilégiée, en d’autres termes, les dirigeants savaient que l’entreprise avait de moins belles perspectives que ce que pensait le marché. Rappelons d’abord ce qu’est une information privilégiée : « une information précise qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d’instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou sur le cours d’instruments financiers qui leur sont liés« . En l’espèce, l’AMF observe que selon le taux de change utilisé pour bâtir le plan, le résultat pouvait être supérieur aux attente des analystes. Il n’y a donc pas eu en l’espèce de tromperie du marché.
Deuxième accusation : les retards sur l’A380. Cette fois, la commission se penche sur une réunion du 17 février 2006 au cours de laquelle différents problèmes de livraison ont été évoqués. Mais elle constate que ces questions sont habituelles dans le secteur et qu’il ne s’agissait à l’époque que de vagues craintes, n’entrant pas dans la définition de l’information précise susceptible d’être qualifiée de privilégiée. En réalité, ce n’est que plus tard que le retard sur l’A380 est devenu certain, après les cessions de titres critiquées. Le grief est donc écarté.
Je vous passe les deux autres accusations concernant les coûts de développement de l’A350 et les prévisions de résultat, pour ne pas être trop longue, elle seront écartées aussi globalement parce que les mauvaises nouvelles n’ont été connues avec certitude et précision qu’après les réunions de février et mars au cours desquelles les mis en cause étaient susceptibles d’avoir pris la décision de céder leurs titres.
Que penser de tout cela ? Que nous avons, là comme dans beaucoup d’affaires financières, une querelle de techniciens du droit sur le caractère constitué ou non d’une infraction. Rappelons que le droit n’est pas approximatif, il fixe des définitions précises des actes répréhensibles. Si les conditions sont remplies, il y a condamnation, dans le cas contraire, non. Certains d’entre vous soupçonneront sans doute une intervention politique. Je ne le pense pas, mais je n’ai suivi le dossier que de loin, c’est donc un simple avis. Le système répressif de l’AMF est conçu de sorte à assurer son indépendance et je vois mal les magistrats composant la commission accepter de juger comme on leur dit de faire. S’il y a éventuellement quelque chose à mettre en cause ici, c’est le talent des avocats qui ont défendu les « accusés ». Mais après tout, c’est le jeu et, en l’espèce, la décision est parfaitement orthodoxe, juridiquement parlant. Sachez que dans des affaires aussi sensibles, la pression est énorme et ceux qui sont en charge de la décision sont parfaitement conscients que, s’ils prononcent des mises hors de cause, ils seront accusés d’être manipulés. C’est la crédibilité de l’AMF qui est en jeu, non seulement en France mais aussi à l’égard de ses homologues des autres grandes places financières. C’est aussi la crédibilité de la place de Paris toute entière. Voilà qui pèse au moins autant que des amitiés réelles ou supposées, fussent-elles particulièrement haut placées.
Note : à défaut de lire la décision en intégralité, vous pouvez consulter le communiqué de presse de l’AMF qui synthétise assez bien sa position.
Merci Aliocha pour ce travail, clair, net et précis.
Commentaire par Markus — 18/12/2009 @ 11:38
Bonjour Aliocha, et merci en effet pour cet article très clair.
J’ai une question supplémentaire : comment cette décision s’insère dans la procédure pénale ? Y-a-t-il déjà eu des décisions de l’AMF infirmées au pénal ?
Aliocha : les mêmes faits peuvent être punis deux fois, une fois par l’amf et une deuxième fois par la justice pénale, à cette réserve près que la somme des deux condamnations ne peut être supérieure au maximum encouru. Cette réserve, fixée de mémoire par le Conseil constitutionnel est censée éviter la double peine, interdite dans notre droit. Quand on parle de dépénaliser le droit des affaires, on évoque souvent ce sujet pour tenter d’éliminer au moins une procédure. Car si on ne peut être condamné au double de la peine, il n’empêche que ça fait deux procédures sur les mêmes faits qui durent des années pour, au final, être parfois mis hors de cause. Cela étant précisé, théoriquement, la justice peut voir une infraction là où l’amf n’en a pas vu et inversement. Sauf que l’amf est l’expert dans ce genre d’affaires de sorte que si elle ne trouve rien à redire, c’est que généralement il n’y a rien, sauf erreur d’analyse juridique. Ensuite, les personnes sanctionnées par l’amf peuvent faire un recours devant la cour d’appel, laquelle peut annuler la décision, ou diminuer l’amende. De mémoire, c’est ce qui s’était passé dans Vivendi (réduction de l’amende). Pour le reste, il faudrait que je fasse des recherches, je n’ai pas d’exemple en tête d’affaires ayant fait l’objet d’une double poursuite dont les résultats auraient été différents, mais il y en a sûrement.
Commentaire par Hub — 18/12/2009 @ 12:59
Bonjour,
Si j’ai tout bien lu le délit d’initié est puni par l’amf et au pénal… la décision de l’amf préjuge t’elle forcement de celle du pénal ? (y’a t’il même un lien ? )
Aliocha : voir ci-dessus. La justice mène ses propres investigations, en s’appuyant notamment sur celles de l’AMF car l’amf a des moyens techniques d’investigation dont la justice ne dispose pas.
Commentaire par Karam — 18/12/2009 @ 13:01
Ah! Vous voyez!
Là, je suis sûr qu’on va pouvoir communiquer un max!
Bon, évidemment, le droit boursier, l’AMF et les retards de l’380, c’est moins bandant que Google ou la burqa ou la pub et la com.
Mais je note qu’à travers cet article un peu technique, vous épinglez les avocats. De quoi attiser l’esprit de polémique qui pourrait nous faire défaut à l’approche des fêtes.
Aliocha : je les épingle pas. Je souligne simplement qu’au-delà de l’hypothèse des pressions politiques, il y a plus simplement une querelle d’experts et que les avocats spécialisés sont excellents. D’ailleurs, ils ont été excellents non pas sur les moyens de procédure qui agacent toujours le citoyen moyen, mais sur la lecture des textes concernant le fond, autrement dit les infractions elles-mêmes.
Commentaire par tschok — 18/12/2009 @ 13:38
Oui, et comme qui dirait l’autre, mieux vaut un coupable dehors qu’un innocent en prison.
Maintenant, dans le fond, personne ne peut savoir si dupont ou durand n’a pas eu des infos avant une réunion. Il suffit de lors d’un bouffe dire : « j’ai un drôle de pressentiment, j’ai pas l’impression que les livraisons vont se produire comme on l’attend, il y a trop de petits signes vraiment étranges en ce moment. » Est-ce ou pas une information ? cela dépend de qui la donne : le concierge ou un directeur adjoint qui a 30 ans de boites. Maintenant je ne peux pas juger. Il y a parfois d’étranges coïncidences dans la vie.
Mais (troll oblige) pourquoi, cette ‘rigueur’ n’est-elle pas appliquée lorsque l’arabe ou l’étudiant gauchiste est accusé par le pandore de l’avoir outragé ?
Parce que dans ce cas là, on peut pas se payer des avocats de cette trempe ?
Parce que les tribunaux ont moins peur de punir un innocent ?
Parce que le monde est en perpétuel construction et que cette partie de la construction n’est pas aussi achevé que l’on pourrait penser ?
Commentaire par herve_02 — 18/12/2009 @ 13:54
Bonjour Aliocha,
Merci pour ce post. Voilà, pour moi, l’exemple parfait d’un excellent travail journalistique: l’énoncé de la décision prise et des faits qui l’ont précédée puis des explications intéressantes et intelligentes et sur la fin, une mise en perspective sur les difficultés et les enjeux qui entourent la décision prise. On dirait de l’Eolas. Très sincèrement, bravo. J’aimerai lire ou entendre la même chose sur bien d’autres sujets comme par exemple celui-ci: http://www.jpchevallier.com/article-core-tier-1-leverage-41300389.html. Gardons espoir.
Bon week-end
Commentaire par H. — 18/12/2009 @ 14:11
Bonjour,
Je suis néophyte en matière de droit aussi bien qu’en matière financière, donc je pars avec un certain handicap sur le sujet… Mais si je comprends bien l’analyse de l’AMF sur le point des retard de l’A380, les dirigeants vendeurs sont saufs parce qu’ils ont anticipé un risque et non une certitude ? N’est-ce pas un peu hypocrite ?
Xavier
Aliocha : nous sommes dans le quasi-pénal, les amendes peuvent atteindre 10 millions d’euros ou le décuple des profits réalisés, ce qui n’est pas rien. L’amf doit donc respecter les prescriptions de l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme sur le droit à un procès équitable. Par conséquent si les éléments constitutifs de l’infraction ne sont pas réunis, il ne peut y avoir sanction. En l’espèce, il n’était pas démontré que les mis en cause disposaient d’une information précise susceptible d’être transmise au marché et qu’ils auraient utilisée pour spéculer. Je ne pense pas qu’on puisse parler d’hypocrisie, mais simplement d’un système qui ne peut punir que si les faits sont démontrés. C’est une protection contre l’arbitraire.
Commentaire par Xavier — 18/12/2009 @ 15:05
@ Aliocha, voici un billet comme j’aimerai en lire plus souvent, même chez vous, bien que la qualité de votre blog soit malgré tout largement au dessus de la moyenne il faut bien le reconnaître(ne serait-ce cette monomanie sur la « guerre » journalisme/internet/blogueurs).
@ Xavier: spéculer en bourse n’est pas interdit, anticiper un risque non plus, ce qui l’est, c’est de rompre l’égalité entre les acteurs des marchés, pour simplifier les choses. L’information boursière a donc une importance stratégique. Partant de là, ce qui est interdit, c’est effectivement de profiter d’une information privilégiée et non communiquée au marché pour en tirer profit en vendant ou achetant.
l’AMF constate que les vendeurs ont vendus avant de connaître l’information privilégiée (les informations privilégiées, plutôt) qui ont ensuite été communiquées au marché et fait chuter le cours de bourse. Finalement, c’est assez simple…
Commentaire par Légisphère — 18/12/2009 @ 19:17
Bénie soyez vous, Aliocha (d’ailleurs vous n’êtes pas prophète de la danette?)
Cela dit c’est un compliment terrible que vous leur faites: ils savent interpréter le texte…
Aliocha : ils savent surtout convaincre une autorité assoiffée de sang en ces temps troublés et certainement décidée à en découdre avec la haute finance que leurs clients ne sont pas les bonnes personnes à mettre à l’ombre, ce qui n’était pas gagné. Vous me direz, pour 20 mis en cause, on a dénombre 80 conseils !!!!! Faut ce qu’il faut.
Commentaire par tschok — 18/12/2009 @ 19:58
Vous dites que l’AMF était assoifée de sang et décidée à en découdre. Je vous donne volontiers crédit sur ce point. Mais au vu du résultat (kedalle), on ne peut pas qualifier cette soif et cette volonté de suffisantes. D’où la question : l’AMF a-t-elle les moyens de ses ambitions ?
Aliocha : j’ai un peu forcé le trait pour titiller Tschok 😉 Ce que je veux montrer c’est qu’on peut penser en entendant le résultat que les puissants s’en sortent toujours et que le système est pourri. En réalité, je ne pense pas que ce soit le cas en l’espèce. Les faits se sont passés avant la crise, mais ils sont jugés en pleine crise, donc à un moment où la pression médiatique est énorme sur ce type de sujet et où les pouvoirs publics ont fortement tendance à serrer la vis. Je pense que ce sont les combats qui ont du être les plus difficiles pour les avocats. Politiquement, c’était le moment mais aussi le dossier rêvés pour faire un exemple. Ce d’autant plus que l’AMF n’a pas la réputation d’être tendre. Il faut savoir qu’on est dans une logique administrative, semblable à celle du fisc, bref, ça rigole pas à l’AMF, l’autorité est très redoutée. Maintenant a-t-elle les moyens de ses ambitions ? Oui, l’AMF fait partie des rares institutions qui ne se plaint jamais de manque de moyens. Elle se finance fort bien par des frais prélevés sur les opérations financières. Par conséquent, c’est vraiment une question juridique qui a déterminé le résultat de la procédure.
Commentaire par Olive — 18/12/2009 @ 22:30
« …on ne condamne pas sur des apparences ».
Ca c’est comme la Danette et le Nutella, en apparence ça à l’air gras et très sucré, mais point du tout, en réalité c’est saint comme du petit lait frais et bon pour la santé, c’est écrit sur le pot.
Débattre sur la nuance entre « savoir » et « prévoir » pour des hauts cadres dirigeants, qui sont par définition les gestionnaires sur le long terme, ça fait sourire, d’autant plus qu’ils ont été nombreux à prévoir la même chose au même moment.
Notez au passage que la vente massive et simultanée de leurs actions n’a pas du être très bénéfique pour le titre d’EADS, mais bon, ils ne savais pas non plus qu’ils étaient plusieurs à prévoir la même chose en même temps.
Moi, personnellement je pense qu’ils savaient bien que ce qu’ils avaient prévu allait se passer.
Commentaire par MadameSoleil — 18/12/2009 @ 23:00
@herve: En effet, comme vous le soulignez, les retards, il y avait sans doute de très nombreux cadres et ingénieurs au courant. Ce genre de choses finit par se savoir – tel projet urgent l’est moins vu que l’on repousse de quelques mois, etc. Il est inévitable qu’il y ait des fuites.
Commentaire par DM — 19/12/2009 @ 00:17
Merci pour ces explications, Aliocha, ça m’a permis de m’informer sur ce sujet de la façon que je préfère : bien construit pour les mekeskeldiS (S de pluriel).
On dirait du Eolas (à prendre comme un compliment).
Maintenant, ne pourrait-on trouver un moyen de modifier les stock-options pour empêcher les risques de manquements/délits d’initié, tout en laissant l’intéressement des employés du groupe à la bonne marche de l’entreprise ?
Par exemple, on attribut des stock-options à la date t avec obligation de les lever à t + 2 ans en choisissant le cours soit à t, soit à t+2 et de vendre les actions. Je ne suis pas expert, loin s’en faut.
Commentaire par ancilevien — 19/12/2009 @ 09:59
@ancilevien, 13
C’est amusant ces suggestions techniques qui fleurissent après coup pour solutionner les travers économiques et financiers auxquels nous assistons quasi-quotidiennement. Vous oubliez simplement que les concernés sont des spécialistes de la technique qui auront vite fait de retourner votre solution pour la rendre toute aussi juteuse pour eux que la précédente !
Commentaire par JérômeK — 19/12/2009 @ 10:53
@JérômeK, 14
Alors quoi, complètement séparer les jeux financiers des banques comme proposait je ne sais plus qui ?
Pour passer des lois, il faut du pouvoir, dans notre société, l’argent est le pouvoir, donc on risque peu de voir passer des lois régulant l’argent.
Commentaire par ancilevien — 19/12/2009 @ 12:00
Je devrais peut être vérifier avant de poster mon éventuelle bêtise qui suit mais à l’époque de « l’affaire JM Messier » l’AMF ne l’avait-elle pas blanchi également avant que le pénal ne l’estime coupable? je pose la question mais je vais de ce pas vérifier 😀
Merci pour l’article.
Commentaire par Elaïs — 19/12/2009 @ 21:54
Si je viens de vérifier, l’AMF n’a pas caractérisé le délit d’initié chez Messier non plus. Décidément tous des agneaux !:D
Commentaire par Elaïs — 19/12/2009 @ 21:59
Merci Elaïs pour ce petit rappel historique.
Au final, on finit par se demander si l’AMF est aussi indépendante et efficace que ce qu’on veut bien nous faire croire.
D’ailleurs, existe-il au moins une affaire dans laquelle un grand ponte des affaires boursières douteuses a été épinglé par l’AMF ?
Commentaire par Oeil-du-sage — 19/12/2009 @ 22:47
Lire sur marianne
Pour Marc Chesney, professeur à l’institut bancaire suisse à l’université de Zurich, l’enquête de l’AMF est probablement tronquée.
http://www.marianne2.fr/EADS-Une-enquete-tronquee_a183190.html
Aliocha : « Tronquer » signifie couper, retrancher. Utilisé dans ce cas de figure, il ne rend pas compte de manière exacte du propos de l’intéressé. Celui-ci ne dit pas en effet qu’on a retiré des éléments de l’enquête mais que celle-ci aurait pu porter sur un ensemble plus large d’opérations. Or, selon cet enseignant, les régulateurs boursiers ne disposent pas des outils nécessaires pour suivre les options. Pas plus l’amf que les autres. Possible, le sujet mérite d’être creusé. Dans ces conditions, en dehors des cessions d’action intervenues en mars, il aurait pu y avoir d’autres opérations plus sophistiquées en mai. Possible également. Cela n’ôte rien au fait que juridiquement les faits observés et jugés ne constituaient pas une infraction parce qu’à la date où les ventes d’actions sont intervenues, il n’est pas démontré que les auteurs disposaient d’informations précises, susceptibles d’être livrées au marché, qui auraient eu un impact sur le cours et auraient pu être qualifiées de privilégiées.
Commentaire par Papi Emerveillé par la justice — 20/12/2009 @ 11:35
Si on ne s’attache pas à regarder de trop près les fonctionnements de l’AMF et les raisons « techniques » qui font que toute poursuite est abandonnée, ce type de situations récurrentes reste pour le moins singulier.
Enoncé (objectif) des faits :
– Un organisme puissant et compétent, doté d’outils sophistiqués (l’AMF) détecte des mouvements financiers suspects de la part de plusieurs cadres et actionnaire d’un grand groupe industriel,
– La concomitance curieusement fortuite avant l’annonce de mauvais résultats économiques dudit groupe industriel (provoquant la chute brutale de l’action) incite l’AMF a ouvrir une enquête,
– Au terme de l’enquête, la direction de l’AMF décide de transmettre le dossier à la commission des sanctions,
– Au final, la commission conclut à l’innocence de tous les mis en cause…
Soit il y a anguille sous roche, soit l’AMF n’est pas aussi compétente que cela pour aller aussi loin dans la procédure et finalement s’entendre dire : « vous vous êtes tous trompés, circulez, il n’y a rien à dire et rien à voir ! ».
Le reste, les querelles de procédures, les démonstrations magistrales des avocats et des experts, c’est du blabla technique et juridique plus enclin à faire briller le gratin du barreau d’affaires parisien qu’à remettre un peu de moralité et de solidarité nationale dans tout cela (l’attitude des dirigeants du groupe reste pitoyable).
Je me permets juste un petit parallèle avec de récentes affaires juridiques dans lesquelles on vous a vu vous prendre le bec avec l’éminent Me Eolas, auquel vous tentiez de faire comprendre qu’il est des situations juridiques singulières et choquantes pour le commun des justiciables, ce à quoi Eolas vous répondait, « Calmez-vous chère Madame, juridiquement et techniquement il n’y a rien d’anormal ! ».
Aliocha : s’il y a une faiblesse, elle se situe dans la compétence des enquêteurs et, à un degré moindre, dans la qualité des travaux du rapporteur. Contrairement à la police judiciaire, ils sont moins aguerris sur le terrain juridique et donc bétonnent mal leurs dossiers. C’est une logique technico-administrative qui s’accommode mal des exigences quasi-judiciaires (en termes de procédure et de droits de la défense) qui président à la suite des débats devant la commission des sanctions. Les avocats ont donc des points d’accroche pour démolir les dossiers. Ce qui a d’ailleurs parfois le don d’irriter les magistrats de la commission car certains dossiers peuvent s’effondrer alors que les faits paraissaient constitués. Je ne dis pas que la décision rendue dans cette affaire est satisfaisante, simplement qu’elle est juridiquement solide. Mon propos était surtout d’éclairer le mécanisme pour montrer où sont les vraies failles.
Commentaire par Oeil du Sage — 20/12/2009 @ 12:43
« éclairer le mécanisme »…
C’est bien ça le problème : à force de rester le nez collé au mécanisme on fini par ne plus voir comment marche la machine dans son ensemble.
Je ne dis pas ça pour vous ; c’est un travers auquel on assiste malheureusement tous les jours et dans tous les domaines, surtout judiciaire.
(c’est le syndrome de la virgule mal placée qui anéantit souvent toute une procédure).
Commentaire par Oeil du Sage — 20/12/2009 @ 13:33
Un point reste à confirmer également, mais sauf erreur de ma part, les cessions des options réalisées par les sphères dirigeantes l’ont été dans la courte fenetre durant laquelle ils avaient le droit de le faire, c’est à dire peu de temps après un CA d’EADS.
Dans ces conditions d’application d’option, si un délit (pardon manquement vu que c’est dans une logique purement AMF et pas pénale) d’initié est retenu, je me demande quand un dirigeant va pouvoir vendre ses options sans être soupçonné du même manquement…
Par rapport à la réaction des cours en Juin 2006, le *marché* devait se douter bien avant que tout ne roulait pas parfaitement bien, et que l’avenir était assez compliqué. Mais de là à faire subir au cours une chute de 26% sur un seul jour (passant de 30€ à 10€ en quelques semaines), il y’a – je pense – quelque chose de plus qu’un simple rattrapage. Voire une volonté presque délibérée de ré-équilibrer les cours qui étaient auparavant sur-évalués pour se retrouver très rapidement sous-évalués.
Et enfin, il est également difficile de considérer que EADS sur son projet A380 a entrainé une telle chute des cours (2 ans de retards à l’industrialisation alors que l’avion volait déjà, et volait même bien !), avec un projet co-financé par les états impliqués et un carnet de commande relativement modeste – et donc des pénalités encourues limitées, alors que de l’autre coté de l’Atlantique Boeing n’a pas subit de tel correction avec ses déboires autrement plus critiques sur le B787 (plus de deux ans de retards AVANT MEME le premier vol, et des soucis graves dans l’industrialisation).
Quelques procédures pour manquement d’information ont été lancées mais on est très loin des corrections violentes de EADS.
(Lors des annonces successives de reports de 1er vol, l’action Boeing n’a perdu que 3 à 5%, et les conséquences financières sont autrement plus importantes avec un carnet de commande de 800 avions, et un retard qui ne sera pas résorbé avant au mieux 2020 !)
Il y’a donc un sentiment un peu étrange dans la chasse aux sorcières qui a été effectuée jusqu’à présent vers EADS quand on compare les conséquences boursières avec son grand concurrent …
Commentaire par Bob — 22/12/2009 @ 15:58
Concernant les retards de l’A380, cette affaire et les propos des personnes incriminés sont allucinants (en particulier Noel Forgeard directeur d’Airbus à l’époque, qu’on a beaucoup entendu sur le sujet).
Je travaille pour Airbus (en tant que sous-traitant au bureau d’études), et je travaillais sur le programme A380 au moment des faits. Un retard de l’A380 était une évidence pour tous ceux qui gravitaient dans le monde Airbus avec qui j’ai pu discuter (tant tous les ingénieurs que les ouvriers sur les chaines d’assemblage), et ce depuis longtemps (1 à 2 ans avant la vente des actions).
Il y avait juste 2 interrogations : l’ampleur du retard, et surtout et quand ce retard serait annoncé par le management (pour un retard connu depuis plus d’un an, le fait que les dirigeants aient vendu les actions peu de temps avant l’annonce, ça me semble assez flagrant qu’ils connaissaient non seulement l’information sur les retards, mais aussi la date prévue de l’annonce des retards).
Lorsque les dirigeants disent qu’ils n’étaient pas au courant du retard, c’est risible. Si c’était le cas, ça veut dire qu’ils n’étaient pas au courant d’une information que tous les employés connaissaient (une équipe TV devrait aller faire un micro-trottoir à la sortie d’Airbus pour avoir une idée…), et ça serait de bien piètres dirigeants qui ne mériteraient pas un centième de leurs salaires.
Je ne sais pas comment l’AMF a pu arriver à une telle conclusion qui « blanchi » tous les dirigeants, mais elle est tellement déconnecté de la réalité que ça décridibilise complètement cet organisme à mes yeux. Je souhaite de tout cœur que l’action au pénal rétablisse un peu la vérité. En tout cas, si ils ont besoin, ils ont des dizaines de milliers d’employés d’Airbus qui peuvent venir témoigner sur le fait que l’information des retards était « su de tous » bien avant la vente des actions…
Après, pour revenir sur le fond du délit d’initié, l’ensemble du système me semble très pervers : on donne des actions aux grands dirigeants qui ont toutes les informations en main (tant sur le fond que sur la communication) ; comment voulez-vous qu’ils ne vendent pas des actions pour lesquelles ils savent la date précise à laquelle le cours va s’effondrer ? Ce sont des humains comme les autres, et en tout cas pas meilleurs et insensibles à la tentation (et leurs mensonges éhontés dans cette affaire -infirmant une information connue par tous leurs employés- montre à quel point la morale n’arrive pas jusque dans ces strates et qu’ils se croient intouchables…).
Commentaire par Frédéric — 26/12/2009 @ 12:19
Je lis ceci sur Euronews : « Entre le 15 et le 17 mars, les trois enfants de Noël Forgeard ont également vendu plus de 40.000 actions chacun pour un montant total de plus de 4 millions d’euros »
Qui a dit à ces 3 enfants de faire une vente aussi importante? N’est-on pas manifestement en présence de personnes qui vendent tout, suite à un « tuyau » de leur père, dirigeant d’airbus?
Si quelqu’un possède 40000 actions d’un géant, disons Google, qu’est-ce qui peut le décider à vendre brusquement, alors que la bourse est calme, si ce n’est le coup de fil d’un initié?
Commentaire par mick — 18/01/2010 @ 23:40
[…] l’essoreuse de l’Autorité des marchés financiers, l’affaire se termine par un non-lieu général. Un scandale et son couvercle. Magouilles, arnaques et délit d’initiés. Circulez, […]
Ping par Rumine, Hans ! » EADS-toi, le ciel t’aidera — 20/11/2011 @ 11:33
Devenir millionnaire
Parlons donc d’EADS | La Plume d'Aliocha
Rétrolien par Devenir millionnaire — 07/08/2016 @ 09:52