Fichtre, mon amie la com’ a encore des ennuis !
Dans cet article tout à fait savoureux, Rue89 raconte que Bakchich a dévoilé dans sa version papier de la semaine dernière un rapport de la Cour des comptes sur la gestion de la RATP. Rapport apparemment si peu flatteur que la RATP s’est fendue d’un communiqué de presse le 25 novembre dans lequel elle : « s’étonne de la divulgation d’un rapport de la Cour des Comptes, portant sur les exercices 2001 à 2007, document de travail intermédiaire strictement confidentiel ».
Puis elle ajoute : « La RATP souligne que les éléments rapportés donnent une version volontairement tronquée, sortie de son contexte et polémique d’un rapport d’étape qui ne saurait refléter la vision d’ensemble qui sera exprimée par la Cour des Comptes dans ses conclusions définitives. A ce stade, la RATP, respectant la confidentialité des échanges, ne peut répondre point par point à ces assertions tronquées (…) »
Elle n’oublie pas au passage d’argumenter sur le terrain du complot : « Elle note que cette divulgation intervient à un moment où le gouvernement veut clarifier les responsabilités des acteurs du transport public urbain en Ile-de-France, dans le cadre de la loi sur la régulation ferroviaire, qui a été adoptée début novembre par le Parlement, ainsi que dans le cadre de la loi sur le Grand Paris qui est en cours de discussion ».
Entre nous, que cette fuite dans la presse obéisse à des intérêts politiques, c’est tout à fait possible. Mais il est possible aussi quelle vienne tout simplement de quelqu’un qui ne supporte plus que les rapports soient enterrés, c’est de plus en plus fréquent. En tout état de cause, cela ne change rien sur le fond. L’argument relève de la diversion.
Toujours est-il que nous retrouvons ici l’accusation classique à l’encontre du journaliste stupide et/ou assoiffé de scandale, qui ne fait pas la différence entre un brouillon et un document définitif et qui, en plus, ne comprenant rien à ce qu’il lit, en livre une présentation « tronquée », à moins qu’il ne l’ait fait carrément exprès dans l’intention de « vendre du papier ».
Las ! La Cour des comptes réagit et publie le lendemain un communiqué pour démentir les assertions……… de la Com’ de la RATP ! Elle indique que son rapport « retrace les observations définitives de la Cour formulées au terme d’une procédure contradictoire. Il ne s’agit en aucun cas d’un rapport d’étape. Ce rapport particulier est donc bien le rapport définitif de la Cour sur les comptes et la gestion de la RATP de 2001 à 2007« (c’est la Cour des comptes qui met en gras cette phrase, c’est aussi elle qui souligne « définitives »).
Comme le relève Rue89, la Cour des comptes donne de facto raison à Bakchich. Les réactions aussi claires et tranchées ne sont pas légion dans l’univers feutré des institutions. La claque est donc extrêmement violente. Ce qui est encore moins courant, c’est que dans le grand combat entre la com’ et la presse, les journalistes se retrouvent secourus par une autorité au-dessus de tout soupçon qui confirme ouvertement leurs propos.
Le plus amusant, c’est que la RATP avait conclu son communiqué sur cette note d’optimisme : « La RATP est confiante dans la teneur des conclusions que la Cour des Comptes, si elle le souhaite, après s’être réunie en chambre du Conseil, pourrait décider de publier dans son rapport public annuel ».
Résultat du match : Bakchich 1/RATP 0.
L’attachée de presse
Aujourd’hui, j’ai envie de vous faire découvrir un curieux petit animal, aussi charmant que désopilant : l’attachée de presse. Son rôle ? Faire l’interface entre son boss ou son client et les journalistes, organiser des rencontres et tenter d’obtenir des articles dans les journaux.
En réalité, il y a deux catégories d’attachées de presse. La première, minoritaire, est fortement diplomée, voire issue du secteur ou de l’activité qu’elle a choisi de vendre à la presse. Celle-là est très professionnelle, passionnée par son sujet et souvent au moins aussi compétente que les gens qu’elle est chargée de faire rencontrer aux journalistes. Pour un peu on serait tenté de l’interviewer elle, car elle est moins politique que ses employeurs et plus encline à dévoiler le dessous des cartes.
Ah ! L’oiseau des îles
Et puis il y a l’autre catégorie, majoritaire, celle de ce que j’appelle quand je suis de bonne humeur les « oiseaux des îles ». Dans cette aimable catégorie, l’attachée de presse est choisie exclusivement sur son physique. Elle a entre 25 et 40 ans grand maximum, se passionne pour …..son look et annonce en général son arrivée par le léger tintinabulement des multiples colifichets qui l’ornent de la tête aux pieds, quand ce n’est pas par son parfum capiteux ou ses petits babillements joyeux. Regardez-là, si, si, c’est elle là-bas, la jolie créature en mini-jupe qui virvolte autour de son patron. Elle déplace beaucoup d’air inutile mais c’est pour ça qu’on l’a choisie et son boss, un peu emprunté, semble tout à fait ravi d’avoir son oiseau des îles à ses côtés. Ravie, elle l’est plus encore que lui, il y a des journalistes partout, c’est son univers la presse, elle y est comme un poisson dans l’eau. Croit-elle. Parce que les journalistes en réalité, elle les irrite au plus haut point à balancer des banalités ponctuées d’exclamations enthousiastes.
« C’est tellement sympa d’être venue ! »
Aïe, elle s’approche ! On aimerait la prévenir que son sourire forcé risque un jour de rider son joli minois, à moins qu’elle ne se retrouve figée à jamais dans une grimance à force de se torturer ainsi les zygomatiques, mais après tout c’est son problème. La voilà qui vous saute dans les bras avec un « Bonjouuuuuur » sucré à vous en rendre diabétique.« Comment vas-tuuuuuuuuuuu????? C’est tellement sympa d’être venue, j’adore ton sac à main !!!!!!!!!!!!!! ». Si elle savait ce que je m’en fous qu’elle aime mon sac à main, je suis là pour bosser. En plus, il n’y a aucune chance qu’elle l’aime mon sac à main, vu que je m’intéresse autant à la mode qu’elle à la situation du Darfour. C’est le truc préféré de l’attachée de presse, ça, jouer sur l’affect. Combien m’ont sauté au cou avec la même affection débordante qu’un chien qui voit rentrer son maître en fin de journée alors qu’on ne se connaissait même pas. « Ah ouiiiiiiiii, Aliochaaaaaaaaaaaaa, je suis si contente qu’on se rencontre ! ». Heureusement, comme cette catégorie d’attachée de presse n’a strictement rien à dire, la conversation tombe vite à plat, ce qui me permet généralement de fuir m’installer pour lire le dossier de presse avant que la conférence ne débute, tandis que déjà elle accueille avec la même effusion de joie factice mes autres confrères.
Que faire quand on s’ennuie ?
La conférence commence et là j’observe mon oiseau des iles. Il faut vous dire que pendant une conférence de presse, l’attachée de presse s’ennuie, à mourir. Certes, elle pourrait suivre la manifestation puisque c’est elle qui l’a organisée, vérifier que tout se passe bien, que les journalistes sont intéressés, bref, s’impliquer. Mais non, elle préfère s’ennuyer. Ayant rangé son sourire devenu inutile, elle tente néanmoins de s’occuper. Ce qui se traduit le plus souvent par un inventaire complet de sa tenue. Hop, elle tend légèrement la jambe sous la table pour contempler ses escarpins. Impeccables. Elle a bien fait de craquer pour cette paire de chez Machin en soldes l’année dernière. Ensuite, elle tire un peu sur sa jupe, qu’elle a choisi trop courte, faut ce qu’il faut. Et puis elle passe aux ongles, c’est fou ce qu’un travail de bureau, si modeste soit-il peut être risqué pour le vernis à ongles. Il faudra qu’elle pense à réserver une manucure lors de son rendez-vous bi-hebdomadaire chez le coiffeur. Ensuite, elle passe aux multiples petits bracelets qui ornent ses poignets, avant de tendre un peu la main pour faire jouer la lumière dans la pierre d’une de ses bagues. Tout ceci lui a pris environs 20 minutes, la conférence évidemment n’est pas terminée alors elle recommence. Elle peut faire ça des heures, l’attachée de presse. Pour un peu, ça me rendrait admirative. Dans le meilleur des cas, elle pianote vaguement sur son portable, enfin maintenant sur son i-phone, et prend un air inspiré quand il vibre. Parfois, l’appel a l’air si important qu’elle se lève et, en trottinant sur ses talons aiguilles, le portable vissé à l’oreille, elle quitte la salle comme si on venait de la prévenir que la troisième guerre mondiale était déclarée. En fait, elle va juste prendre l’air sous un prétexte futile en en profitant pour faire croire à tout le monde qu’elle est Dé-bor-dée !
Bon, tout cela est bien mignon mais l’essentiel a été dit et j’ai un autre rendez-vous dans un quart d’heure. Je m’éclipse discrètement avant la fin, en espérant qu’elle ne me verra pas. Loupé, elle est déjà sur mes talons. « Merci d’être venuuuuuuuuuuue, si tu veux une interview, surtout n’hésites pas, ça t’a intéresséeeeeeeeeeeeeee? Tu vas faire un papier ?!!! ». Je cours déjà vers la sortie en lançant un elliptique « je vais voir avec mon redac’chef » tout en me disant que si elle avait écouté la conférence, elle aurait peut-être saisi que ça ne présentait aucun intérêt. Allez savoir.