La Plume d'Aliocha

09/01/2017

Bienvenue dans l’ère de la post-vérité judiciaire

Filed under: Justice,questions d'avenir,Réflexions libres — laplumedaliocha @ 10:33

sauvage_0« Je ne suis pas du tout coupable » a déclaré vendredi soir au journal de France 2 Jacqueline Sauvage. Elle était, avec ses deux avocates, l’invitée du Journal de 20h pour commenter la grâce présidentielle (Reportage à 19:32 – interview plateau 22:30). Une invitée qui, dit-on, a dopé l’audience.  Pour mémoire, France 2 a offert 3 fois les honneurs du 20h à Jérôme Kerviel. Il faut croire que l’erreur judiciaire réelle ou supposée est médiatiquement rentable. Si la petite phrase de Jacqueline Sauvage sur son innocence a pu ravir son très actif comité de soutien et faire verser une larme aux téléspectateurs, en revanche, il a fait frissonner les juristes. Car ils se sont souvenus que c’est notamment en raison de ce déni, déni de crime, déni de l’existence d’une autre victime, que les demandes de liberté conditionnelles avaient été refusées.

Désapprobation générale dans la magistrature

Les juges honnis, ces grands mâles blancs (suppose-t-on par construction, si ça se trouve c’était des femmes  issues de la diversité) avaient donc analysé correctement la situation. Jacqueline Sauvage ne se sent coupable de rien.  Ses avocates quant à elles s’emploient en plateau à minimiser les protestations du monde judiciaire. Elles proviendraient  essentiellement, assure Me Tomasini, du Syndicat de la magistrature, sous-entendu pour les initiés d’une frange minoritaire et très marquée à gauche de la magistrature (celle du mur des cons) dont on ne comprend pas bien au demeurant pourquoi celle-ci pourrait soudain vouloir défendre le pouvoir du grand mâle blanc. En vérité, le reportage de Dominique Verdeilhan donnait  la parole à Virginie Duval, présidente de l’USM, syndicat majoritaire, modéré et sans étiquette politique qui a dénoncé le mauvais signal consistant à « aller taper à la porte du président de la République » pour » défaire tout ce que la justice a fait ». Au passage, on songe en les écoutant toutes les trois à l’extraordinaire coup de com’ pour François Hollande. Ses conseillers en communication ont du boire du petit lait lorsque Jacqueline Sauvage a décrit ce président « humble », à l’écoute, qui a si bien reçu et prêté attention à ses filles.

Le problème de l’affaire Sauvage, c’est qu’on choisit la mauvaise personne pour défendre le bon combat. Nul ne remet en cause l’urgente nécessité de traiter le problème des violences faites aux femmes. Mais ne pouvait-on  trouver meilleure figure de proue qu’une femme rompue au maniement des armes qui, au bout de 47 ans de vie commune ponctués dit-elle de violences à son endroit et d’agression sexuelles sur ses filles, tire trois balles dans le dos de son bourreau assis ? C’est comme l’affaire Kerviel, nul ne conteste la nécessité de critiquer la finance, le trading, et plus généralement la pression que l’entreprise exerce sur ses salariés pour des questions de rentabilité, mais pourquoi choisir comme étendard de tant de justes causes un homme qui pendant plusieurs mois a satisfait sa passion du jeu en utilisant les fonds de sa banque pour miser sur les marchés comme on joue au casino ?

Parce qu’il n’y en avait pas d’autres, songera-t-on. Il semble au contraire qu’il y ait hélas beaucoup de femmes battues.  Quant aux rogues traders, en France, il y en a eu deux. Jérôme Kerviel en janvier 2008 à la Société Générale pour une perte de 4,9 milliards et Boris Picano-Nacci en octobre suivant à la Caisse d’Epargne pour 750 millions. La parallèle entre les des deux dossiers est édifiant. Tandis que Kerviel a dissimulé entre mars 2007 et janvier 2008 une activité de spéculation non autorisée, Picano-Nacci lui n’a rien caché, à personne. On lui a demandé à l’été 2008 de mettre fin au trading pour compte propre de la banque et donc de céder les positions,  il a  fait les mauvais choix et a été emporté par la tourmente des marchés. Celui-là méritait le feu des projecteurs. Celui-là a vraiment vécu la situation possiblement injuste revendiquée par Jérôme Kerviel. Seulement voilà, l’homme a pris acte de sa condamnation – prison avec sursis et remboursement de 315 millions-, transigé avec sa banque et recommencé une nouvelle vie. Aujourd’hui, ce diplômé de mathématiques issu d’un milieu populaire enseigne sa discipline à des étudiants en finance et vient de sortir un livre sur son histoire. Dans la quasi-indifférence des médias. Il est vrai qu’il ne hurle pas au complot, n’est pas rentré à pied de Rome, ne fréquente pas l’univers des people, et ne livre pas de faux scoops à la presse tous les mois pour relancer son affaire.

Transformer les coupables en innocents

Si  les médias ont pu dans l’histoire contribuer  à corriger des erreurs judiciaires, par un singulier renversement des valeurs, ils sont aujourd’hui manipulés de plus en plus souvent par des coupables qui veulent défaire à la télévision les jugements défavorables dont ils ont fait l’objet en Justice (Lire à ce sujet les Grands fauves du barreau chez Calmann-Levy). C’est ce qu’on peut appeler l’avènement de la post-vérité judiciaire. Ce concept de post-vérité au début m’a fait sourire, je n’y ai vu qu’une facétie de la novlangue pour trouver un nom moderne au mensonge, mais en creusant un peu, j’ai compris que c’était bien plus intéressant que cela et surtout qu’il y avait des gens pour applaudir cette rupture de la pensée avec le factuel. Il y a bien des raisons à cela, depuis l’organisation de notre cerveau, jusqu’à l’influence structurante des technologies sur les esprits, en passant par l’intérêt des uns et des autres à mentir, pardon, à affirmer leur vérité au sein de vérités multiples et relatives.

Hélas, jamais la mise en garde d’ Hannah Arendt n’a sans doute eu autant de force qu’aujourd’hui : “Les faits sont la matière des opinions, et les opinions, inspirées par différents intérêts et différentes passions, peuvent différer largement et demeurer légitimes aussi longtemps qu’elles respectent la vérité de fait. La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l’objet du débat” .

C’est cette vérité de faits qui s’effondre. D’où l’engouement pour Jérôme Kerviel ou Jacqueline Sauvage. Combien de personnes s’accrochent à l’innocence de Kerviel non pas pour des raisons rationnelles, connaissance du dossier ou de l’univers concerné -, mais pour des motifs émotionnels, les uns détestent les banques, les autres ont une sympathie innée pour le personnage, ou son avocat, d’autres encore trouvent en lui une bonne raison de s’indigner contre le système….Sans oublier ceux, ils sont les plus inattendus, qui pensent préserver l’image de la finance en privilégiant la complicité de la banque car il vaut mieux à leur yeux être un voyou qu’un imbécile. A tous ceux-là il est impossible de démontrer qu’ils se trompent. Ils ne croient pas, ils veulent  croire et donc ne s’intéressent pas à ce qui peut briser le mythe. Au fond ce n’est pas bien nouveau. Ce qui l’est, c’est qu’il ne semble plus exister de garde-fou contre cette tendance à préférer l’erreur qui plait à la réalité qui dérange. La raison est sommée par l’émotion de s’incliner. Et l’émotion trouve un puissant allié dans ce post-modernisme qui affirme qu’il n’existe pas une vérité, mais des vérités et qu’il est donc possible de choisir la sienne.

Au bout de ce processus, il y a, on le sait, le Brexit ou Trump. Mais il ne faudra pas attendre bien longtemps pour voir les plus violents pourfendeurs du nouveau président des Etats-Unis trouver la contorsion dorsale qui leur permettra de légitimer cette élection pour éviter de devoir renoncer à leur relativisme. C’est tout le danger de préférer une plaisante et confortable erreur à l’exigeante discipline qui consiste à s’imposer sans cesse de penser le plus juste possible. Evidemment, le fil rouge de tout ceci, c’est l’éthique, mais c’est une autre histoire….

27 commentaires »

  1. Merci pour cette citation d’Hannah Arendt ! Mais gouverner par l’émotion, c’est tellement plus simple et efficace que par la raison

    Commentaire par Remseeks — 09/01/2017 @ 11:03

  2. Je ne parviens pas à comprendre pourquoi vous persistez à faire un amalgame entre l’affaire Kerviel et l’affaire Sauvage …
    Dans le premier cas, Kerviel a été condamné au pénal et n’a bénéficié d’aucune faveur extravagante de grâce. Il a purgé sa peine selon les règles du droit! Notons – ce n’est pas le plus léger des arguments! – qu’il n’y a pas eu mort d’homme : Kerviel n’a tué personne!
    Dans le second cas, Sauvage a sauvagement assassiné son mari de trois balles de fusil en lui tirant dans le dos alors qu’il était assis … Il n’a eu aucune chance de sauver sa peau. Sauvage a bénéficié d’un pouvoir constitutionnel accordé au Président de la République. C’est ce pouvoir-là qu’il faut abroger, purement et simplement. Il est devenu désuet car a été mis en place pour commuer une peine de mort (qui a un caractère définitif!) en peine de réclusion à perpétuité, rien de plus!
    Juridiquement, si Sauvage soutient qu’elle ne se sent pas coupable, elle conteste l’autorité de la chose jugée! Elle n’a pas introduit un pourvoi en Cassation. Cela signifie qu’elle accepte la sanction. En la contestant sans apporter d’éléments nouveaux susceptibles de justifier une demande en révision du procès, elle commet un DELIT. A ce titre elle est passible de poursuites judiciaires. C’est sur ce terrain qu’il faut agir, pas sur celui de la grâce dont elle a bénéficié. D’une manière certaine, ses avocates vont désormais agir aux fins d’obtenir son amnistie (il faut une loi) puis sa réhabilitation (plus difficile …)! Pour le moment, il est trop tôt mais ces initiatives vont voir le jour : j’en suis convaincu.

    Commentaire par Jacques Heurtault — 09/01/2017 @ 11:21

  3. Merci pour ce billet. Je déplore avec vous ce que vous résumez super-bien par le titre de ce post. Dans ce qu’on appelle « les médias », la part des professionnels ne cesse de décroître face à l’appropriation des réseaux sociaux par le quidam lambda, qui aurait tort de ne pas l’utiliser à son propre profit. Dusse-t-il asséner sa vérité comme une alternative évidente à des conclusions auxquelles sont arrivés des jurés manipulés, partiaux, inhumains, … …. Pauvre France

    Commentaire par Ginkgo — 09/01/2017 @ 12:00

  4. Prenons de la auteur « Je ne suis pas du tout coupable » c’est évident elle est entièrement amère, çà se lit sur son visage, une des nb cocue de la vie, une victime uber alles que la société de + en + anonyme produit et doit recycler, tout un symbole du sacré de l’atomisé, jésus est partout et s’incarne, comme les shrinks, psychanalystes en anglois. Que Poutine emporte toute cette engeance de zombies bouffis dont la pseudo vie devient une Sentence de Souffrance.

    Commentaire par Georges Dubuis — 09/01/2017 @ 12:19

  5. Etonnée que dans cette affaire de grâce présidentielle on ne revienne jamais sur le point de départ : l’erreur de calcul dans les réquisitions au procès, qu’il a fallu rattraper ensuite…

    Commentaire par Deully — 09/01/2017 @ 14:07

  6. Bonjour Aliocha,

    Beau billet, très juste sauf sur deux points, le premier sur la supposée manipulation des médias, le second sur le début de votre conclusion.
    Bien sûr que les média sont manipulés mais c’est supposer qu’un certain nombre de vos confrères ne sont que des purs abrutis que de laisser croire qu’ils n’ont rien vu venir. Quoiqu’on puisse en penser, je me garderai bien de les sous-estimer au plan intellectuel. France 2 savait parfaitement ce qu’elle faisait et elle l’a fait sciemment. Comme l’a écrit Philippe Bilger dans son dernier billet « …Jacqueline Sauvage et de ses deux avocates invitées en toute indécence au Journal de France 2. » La seule et unique question dans ce genre de cas est: est-ce que c’est avant tout le fruit d’une initiative isolée ou bien faut-il chercher ailleurs le ou les responsables? Je laisse chacun à ses réponses.
    Pour le début de votre conclusion: « Au bout de ce processus, il y a, on le sait, le Brexit ou Trump. » Je suis navré pour vous mais jusqu’à présent, mis à part des incantations, je n’ai rien lu de probant contre ces choix. En quoi sont-ils ou seraient-ils porteurs de mauvais présage? S’ils signifient que la fin d’une certaine récré a été sifflée, alors là je vous suis. Si c’est pour dire que ces deux évènements ont eu lieu parce que il a été préféré « l’erreur qui plait à la réalité qui dérange », je suis plutôt en désaccord avec vous. J’aurai même tendance à croire que s’ils ont eu lieu, c’est avant tout en réaction à une unanimité un peu trop pressante.

    Bon après-midi

    Commentaire par H. — 09/01/2017 @ 14:11

  7. Je vais être moins pessimiste que vous. Cette affaire et quelques autres sont autant d’arguments pour qu’un jour on rompe totalement le lien entre le pouvoir politique et le pouvoir judiciaire.

    On y arrivera forcément et les affaires Kerviel, Sauvage et d’autres vont clouer les dernières planches d’une pratique d’un autre âge qui avait peut être sa raison du temps où le pouvoir politique se sentait suffisamment légitime pour être capable de défendre des principes et être garant de la constitution.

    Maintenant si on parlait des violences faites aux hommes? Un homme battu dispose de quoi pour se faire aider? Quelles structures? Quelles associations? On en parle peu, on s’en occupe peu, mais ils sont pourtant nombreux et c’est pas évident pour un homme d’aller porter plainte pour violences conjugales.

    Parce que je me demande vraiment la tournure qu’auraient eu cette affaire si Mme Sauvage avait été en fait M. XXXX?
    Pour avoir posé la question récemment à une « féministe » j’ai ma petite idées vous me direz…

    Commentaire par amethyste16 — 09/01/2017 @ 14:20

  8. Pourquoi ne pas vous interroger aussi sur les raisons qui rendent tant de citoyens français susceptibles de croire que la justice a été mal rendue ?
    Vous êtes pourtant une fervente admiratrice d’un ténor du barreau des réseaux sociaux- pas de la vraie vie des tribunaux français- qui passe son temps à enseigner que les coupables ne doivent surtout jamais avouer ce qui n’est pas le rôle d’un auxiliaire de justice se contentant de défendre les droits de ses clients sans encourager leur délinquance et vous ne sauriez ignorer que les faux-témoignages et les escroqueries au jugement sont encouragés, en France, où le juge Gentil qui fit renvoyer un vrai ténor du barreau devant le tribunal correctionnel pour faux est un exception.
    Combien de magistrats, juges et procureurs confondus, ne luttent en rien contre les avocats complices, voire instigateurs d’escroqueries au jugement ?

    NB:Pour ce qui concerne l’affaire Kerviel, je fais partie de vos victimes: l’estime que je vous portais à l’époque m’empêcha longtemps de comprendre que, si Jerôme Kerviel est bien un trader-escroc -contrairement à l’avis des pauvres gens qui lui envoyaient de petites sommes en le prenant pour un héros de l’anti-capitalisme- la socgé avait quand même probablement profité de la partialité judiciaire dénoncée par des élus courageux.

    Commentaire par Dr. Ivana Fulli — 09/01/2017 @ 15:56

  9. Un billet intéressant: « Autorité de la chose jugée et vérité historique » (http://www.vududroit.com/2017/01/autorite-de-la-chose-jugee-et-verite-historique/)

    Commentaire par H. — 09/01/2017 @ 16:44

  10. Ce n’est pas une question de faits, qui sont toujours affaire de témoignages et d’interprétations, ce n’est pas non plus une question d’éthique, l’éthique n’étant jamais que de la morale découpée en tranches, et dont une tranche, bien choisie, fait toujours l’affaire…
    C’est une question de vérité, d’où d’ailleurs le titre de votre billet, chère hôtesse.
    Et c’est une question simple : la vérité existe-t-elle ?
    Je crois quant à moi que oui, ce qui est très mal vu de nos jours.
    Pendant des millénaires la question de la vérité ne s’est pas posée : chaque tribu, chaque clan, chaque culture… avait ses dieux, ses mythes, ses interdits… qui étaient autant d’indiscutables certitudes.
    Et puis est venu la pensée hébraïque, dont le principal apport est la méfiance à l’égard de toute idolâtrée, c’est-à-dire de toute certitude. Introduisant ansi le doute, la pansée hébraïque rendait possible la recherche de la vérité, l’idée-même de vérité.
    Notre monde a pu faire, grâce à cet apport essentiel, le doute, et donc la croyance en la vérité (en une vérité objective, transcendante) les progrès que l’on sait.
    C’est cela qui est rejeté aujourd’hui. C’est cela la « post-vérité ». C’est le retour aux certitudes. Vertigineuse régression !

    Commentaire par Denis Monod-Broca — 09/01/2017 @ 20:13

  11. Une illustration, « chimiquement pure » comme on dit, de ce retour des certitudes (voir précédent commentaire), se trouve dans les vœux de François Hollande le 31 décembre dernier : « notre principal adversaire, c’est le doute »…

    Commentaire par Denis Monod-Broca — 09/01/2017 @ 22:22

  12. « Le problème de l’affaire Sauvage, c’est qu’on choisit la mauvaise personne pour défendre le bon combat. »

    Je pense qu’on peut se demander si l’élan suscité par J. Sauvage n’est pas lié au fait qu’elle a réalisé ce que beaucoup rêvent de faire : assassiner son propre bourreau, la loi du talion en somme. Ce qui expliquerait pourquoi des personnes aussi diverses (donc pas uniquement les féministes) ont adhéré à ce point au personnage et surtout sa rhétorique.

    Commentaire par F. — 09/01/2017 @ 23:52

  13. @ H :

    Bonjour et merci pour votre contribution que je trouve des plus intéressantes.

    Auriez-vous l’amabilité de développer ce que vous entendez par « réaction à une unanimité un peu trop pressante » ?

    A bientôt.

    Commentaire par Zarga — 10/01/2017 @ 08:32

  14. Merci F 9 01 17 à 23:52 d’avoir le courage de partager une interrogation qui relève du bon sens et fait par ailleurs craindre qu’un referendum sur l’opportunité du rétablissement de la peine de mort dans l’arsenal judiciaire risquerait d’apporter une réponse positive des urnes françaises.

    Il n’est cependant pas interdit d’espérer qu’une amélioration de l’estime des citoyens français pour la qualité de la justice rendue en leur nom serait susceptible de diminuer les conséquences de ces pulsions très humaines mais cela suppose que les instances disciplinaires des avocats et des magistrats ne soient pas dénuées de toute efficacité quand l’impétrant ne s’en prend pas à ses confrères.

    Malheureusement, s’il est désormais très facile de déposer une plainte auprès du conseil supérieur de la magistrature contre un magistrat duquel un justiciable pense pouvoir démontrer aisément la partialité, ces plaintes sont vouées à l’échec comme le montrent les chiffres et les décisions rendues publiques. En effet, à en juger par les résultats des plaintes, une seule alternative existe: Soit la sélection, la formation permanente ainsi que la médecine du travail des magistrats français aboutissent à offrir aux français un corps de sur-femmes et de sur-hommes ne commettant que tout à fait exceptionnellement des fautes susceptibles d’être sanctionnées sévèrement par le conseil supérieur de la magistrature et seulement des fautes tout à fait mineures. Soit cette instance disciplinaire est un leurre. En faveur de la dernière hypothèse, oser déclarer comme manquant de capacité à remplir une haute fonction judiciaire un procureur unanimement reconnu comme brillant et ensuite promu à la cour de cassation.
    Nos magistrats français semblent considérer qu’être autorité à bénéficier de confortables pensions de retraite un peu avant la date que l’intéressé aurait préféré ou subir un changement imposé de lieu d’affectation seraient des punitions d’une très grande sévérité.

    Les chroniqueurs judiciaires français préfèrent éviter ce sujet délicat et se concentrer sur la critique superficielle des réactions populaires et, à la rigueur, sur la conduite de quelques rares avocats en veillant bien à ne pas se fâcher avec des ténors véritables du barreau ou des faux-ténors du barreau sévissant sur les réseaux sociaux.

    Commentaire par Dr. Ivana Fulli — 10/01/2017 @ 12:02

  15. Le plus difficile, c’est de vérifier ce que disent les gouvernements, car les infos sont souvent classifiées :

    Commentaire par Yannick — 10/01/2017 @ 15:36

  16. @ Zarga

    Je ne crois pas être le seul à être légèrement exaspéré par l’unanimité médiatique sur de multiples sujets. Citons, pour ne parler que des cas très récents, l’hystérie anti-Trump lors des primaires puis de la campagne américaine, le traitement de « l’information » sur la Syrie ou l’Ukraine, les attaques incessantes contre Poutine et la Russie responsables de tous les malheurs de ce monde, le « réchauffement climatique » qui vaut à tout opposant l’opprobre quasi-automatique. Ça, c’est l’unanimité bêlante. On dirait des cris de moutons (Cf « la ferme des animaux » d’Orwell) et plus les cris sont importants, plus la nature de l’information portée par cette unanimité est faible voire nulle. Et puis, il y a l’unanimité silencieuse comme celle qui entoure le drame du Yemen, du Soudan, du Congo RDC. Au bout d’un moment, on cherche à comprendre pourquoi car une telle unanimité est toujours suspecte. Ça explique en partie le succès des blogs et autres sites internet et des votes « surprenants ». Le cas « Sauvage » est à cet égard exemplaire mais ce n’est hélas pas le seul.

    Bonne soirée

    Commentaire par H. — 10/01/2017 @ 20:00

  17. @ Zarga

    Sur la Syrie: « PROPAGANDE encore ! Le courage d’Yves Calvi salué… par le Nouvel Obs !! » (http://www.insolentiae.com/propagande-encore-le-courage-dyves-calvi-salue-par-le-nouvel-obs/)

    Une fois n’est pas coutume mais ce serait bien si ça se généralisait.

    Bonne journée

    Commentaire par H. — 11/01/2017 @ 11:15

  18. « Au bout de ce processus, il y a, on le sait, le Brexit ou Trump » , c’est là votre conclusion quant à la grâce présidentielle de Mme Sauvage ? Pourquoi n’avoir pas conclu sur Marine le Pen directement, puisqu’en ces temps d’élection présidentielle, tout, absolument tout aboutit chez MLP lui donnant ainsi toutes les raisons de croire en sa victoire comme présidente !!!
    Rien à voir avec Mme Sauvage, je dois ré-installer un compteur d’électricité dans un appartement. Du fait des normes, la maison -refaite il y a trois ans- doit être cassée pour pouvoir répondre aux nouvelles normes. Mieux, edf conseille à la propriétaire -une vieille dame- de faire un procès à son entrepreneur « qui aurait dû prévoir que les normes allaient changer ». Il aurait dû acheter une boule de cristal, c’est sûr !!!
    Les Anglais refusent de se soumettre à ce que nous acceptons et ils ont raison. Ils sont plus courageux que nous ce qui agace dans notre pays, c’est pourquoi on les fustige ! Déjà lors de la seconde guerre mondiale, ils étaient plus courageux que nous, donc, rien de nouveau sous le soleil. Le Brexit nous accuse, et nous ferions bien d’y réfléchir enfin !

    Quant à Trump… Au fond, pourquoi a-t-il gagné sur la maison Clinton ? Parce qu’il a enjambé les médias pour s’adresser directement au peuple américain. Le véritable propos pour les journalistes, c’est de situer différemment par rapport leurs vielles habitudes que je connais pour être journaliste ! À nous, pour commencer, de nous mettre en question à propos de nos tics de travail !

    Jérôme kerviel ? Lui même a été le premier à se dire coupable d’être allé trop loin. La question, c’est pourquoi ses supérieurs hiérarchiques l’ont-ils laissé dépasser les bornes tant que ses opérations étaient plus que rentables pour la banque ? On peut tout de même se poser la question. Cela ne veut pas dire que toutes les banques auraient réagi de la même façon, mais celle de Jérôme Kerviel, oui, elle s’est enrichie sur des opérations qu’elle savait frauduleuses. Rappelons qu’à partir de 20 euros tout client die n’importe laquelle de nos banques est appelée de préférence le vendredi soir à couvrir le plus rapidement possible. Nous ne pouvons donc croire que la banque de Kerviel n’était pas au courant des transactions !

    Enfin, les juges, les magistrats auteurs du « mur des cons », ne devraient plus avoir le droit de prendre des décisions. Imaginons un acte équivalent dans une grande entreprise, tous auraient été licenciés.On licencie pour moins que cela et les magistrats n’ont pas à être au-dessus des lois.Parce qu’il n’y a eu aucune sanction, pas un mot d’excuse, nos concitoyens ont perdu toute confiance en la Justice de ce quinquennat. Il y a toujours des conséquences aux inconséquences judiciaires.Et je ne m’étonne pas, dès lors, que l’opinion se porte désormais contre les décisions de Justice. Et c’est très grave, rien n’est plus dangereux qu’un pays qui a des raisons de ne plus croire en sa Justice.

    Laura Conti

    Commentaire par Laura CONTI — 12/01/2017 @ 15:43

  19. La référence « au mur des cons » est à mon sens un exemple de plus de la « post vérité ».

    Le mur des cons est un tableau qui a été affiché dans un local privé occupé par l’un des syndicats qui représentent les juges, en l’occurrence le syndicat de la magistrature.

    L’image de ce mur n’a pas été diffusée à l’initiative de ce syndicat mais a été prise en cachette puis diffusée par un visiteur extérieur.

    Ce mur n’est pas représentatif de l’état d’esprit des magistrats, personne ne peut d’ailleurs affirmer qu’il est représentatif du syndicat en cause. Personne ne connait le nombre de personne ayant participé à ce mur, ni depuis combien de temps ce « mur des cons » était là.

    Je trouve surtout cette polémique stérile. On découvre que les magistrats ne sont pas des ectoplasmes désincarnés, mais qu’ils ont des partis pris, des préférences politiques, bref que ce sont des humains et qu’ils sont capables d’afficher leur préférences politiques, avec plus ou moins de bon goût, dans un local précisément dédié à une activité politique, à savoir le syndicalisme.

    Commentaire par Seb. — 12/01/2017 @ 19:50

  20. @ H :

    Bonjour et merci d’avoir pris le temps de me répondre.

    C’est sur l’aspect « pression » que je souhaitais réagir : il me semble (mais peut-être que je me trompe, n’ayant suivi que de très loin cette affaire) qu’une des notions qui se dégage de la campagne ayant abouti au choix des électeurs britanniques pour la sortie de l’Union Européenne, porte aussi le goût d’une certaine « pression » (pas la Guinness, hein ?).

    Ces affiches montrant des cohortes de gueux prêts à déferler sur le royaume, cette histoire de millions qui partaient en pure perte, sans retour digne de ce nom vers le royaume… tout ceci me donne le sentiment qu’on a mis sous pression une certaine partie de la population.

    J’ai été abasourdi d’entendre la diffusion d’un extrait d’interview au lendemain de la publication des résultats du vote : un des représentants du camp du « Leave » au Royaume-Uni reconnaissait que non, les millions qui devaient être récupérés des cotisations européennes ne pourraient être reversés au royaume exactement comme cela avait été affirmé.

    Là, j’avoue m’être pincé pour me dire : « mais comment se fait-il que personne, dans le camp de la majorité ayant voté pour la sortie de l’union, n’ait pensé à interroger les têtes d’affiches sur le contenu de leurs allégations avant le vote ? ». Est-ce à dire qu’on voulait tellement y croire, qu’on s’est dit que ça ne pouvait être que vrai ?
    Suffisamment vraisemblable, et bien en phase avec ce qu’on a envie de croire, pour qu’on saute le pas.

    L’unanimisme que vous dénoncez doit l’être à juste titre, mais je ne pense pas que ce soit seulement en réaction à cela que M. Trump ait été élu, ni qu’une majorité de britanniques aient voté pour quitter l’union européenne.

    Commentaire par Zarga — 13/01/2017 @ 13:02

  21. Pourquoi qualifiez-vous l’USM de modéré et sans étiquette politique ? L’USM est clairement à droite, comme le Syndicat de la magistrature est généralement classé à gauche. C’est dommage, votre parti-pris idéologique vous fait perdre une partie de votre crédibilité. Au passage, est-ce que vous avez honte, personnellement d’être de droite ? Il n’y a pas de quoi avoir honte. On a tout à fait le droit d’être de droite.

    Commentaire par Gilbert Duroux — 14/01/2017 @ 19:26

  22. […] janvier). Bienvenue dans l’ère de la post-vérité judiciaire. La Plume d’Aliocha. Repéré à https://laplumedaliocha.wordpress.com/2017/01/09/bienvenue-dans-lere-de-la-post-verite-judiciaire/ Morozov, E. (2017, 8 janvier). Moral panic over fake news hides the real enemy – the digital […]

    Ping par 20170115-20170108 : Revue de presse | Mes usages numériques — 15/01/2017 @ 11:44

  23. @Gilbert Duroux

    Le SM, en tant que syndicat, est ouvertement de gauche (il est né de 1968 et a appelé à voter contre Sarkozy en 2012). Très logiquement, du fait de son apolitisme revendiqué, l’USM se classe à droite du SM mais ne se revendique aucunement de la Droite. Il se veut neutre et si on doit le placer sur un echiquier politique, il est bêtement au centre. Le seul syndicat de magistrat ouvertement de droite, et en cela on peut l’opposer directement au SM, est l’APM (Association Professionnelle des magistrats) actuellement en sommeil. Le triste episode du « mur des cons » restera longtemps une tache indélébile pour le SM. A titre personnel, je considère que sa direction a singulièrement manqué d’honneur en ne démissionnant pas vu l’ampleur du scandale même si ce mur se situait dans un local privé mais la betise est hélas universelle. Ceci dit, le profil politique des adhérents présente parfois des aspects surprenants, profil qui ne se retrouve pas dans le syndicat choisi. Sinon, aucune honte à avoir à se réclamer de la droite ou de la gauche, seule la mauvaise foi érigée en mode de fonctionnement et de raisonnement nuit à la sincérité d’un engagement.

    Bonne journée

    Commentaire par H. — 16/01/2017 @ 14:43

  24. Pour brouiller un peu plus les pistes, à suivre le site Atlantico, l’USM a même eu tendance a glisser à…gauche !!!???

    http://www.atlantico.fr/decryptage/magistrat-justice-finir-avec-magistrature-monocorde-orientee-gauche-alexandra-onfray-359985.html

    Comme il faut toujours se méfier des étiquettes la SYNTHESE, à la manière d’un congrès du PS, c’est de conclure, non sans une pointe d’humour, que l’USM serait à la droite de la gauche comme le serait E. Macron prétendant n’être ni de droite ni de gauche donc en effet… du centre !!!???

    Commentaire par Ardrich — 16/01/2017 @ 16:01

  25. Aliocha, vous devriez avoir honte. Vous ne cessez de pester, avec juste raison, à propos de ceux qui détournent les règles de droit pour obtenir des décisions juridiques allant dans le sens de leur idéologie et vous justifiez une saloperie majuscule qui consiste à voler des images dans un local syndical privé. Vous êtes incohérente. Un local syndical, c’est quelque chose de sacré. Vous savez bien qu’en bonne justice la façon d’obtenir des preuves est aussi importante que les preuves elles-mêmes. J’ai hâte que cette affaire soit enfin jugée et on verra bien si la Justice, avec un J majuscule, que vous sacralisez tant, vous donnera raison.

    Commentaire par Gilbert Duroux — 17/01/2017 @ 23:36

  26. Oups, erreur de ma part. Je pensais que c’était Aliocha qui me répondait, mais c’était H. Malheureusement on ne peut pas éditer. Mes excuses à Aliocha. Je crois me souvenir qu’elle était plus nuancée que ça à propos du « mur des cons ».

    Commentaire par Gilbert Duroux — 18/01/2017 @ 00:33


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