La Plume d'Aliocha

09/12/2013

Bienvenue à Emotionland

Filed under: Coup de griffe,questions d'avenir — laplumedaliocha @ 12:28

L’époque, en tout cas médiatique, est aux larmes, au pathos, à tout ce que les anciens tentaient de contenir par la raison et l’éducation. Il n’y a pas qu’eux d’ailleurs, en extrême-orient, l’émotion est considérée comme un désordre qu’il convient à tout prix de surmonter pour accéder au nirvana qui n’est pas, contrairement  ce qu’on pense généralement en Occident depuis 68, une émotion agréable poussée à son paroxysme, mais  la maîtrise parfaite du désordre des désirs jusqu’à leur éradication totale (écouter à ce sujet, cet excellent numéro des Racines du ciel). Il est vrai que religions et sagesses peuvent s’offrir le luxe de ces conseils désintéressés. Le business au contraire doit susciter le désir, l’émotion, bref le désordre, car c’est cela qui fait vendre.

Et la Centrafrique passe à la trappe

Nos chaines d’information en continu par exemple veulent conquérir des parts d’audience et séduire ainsi de riches annonceurs. Pour y parvenir, il semblerait bien qu’elles aient trouvé la martingale du moment :  l’émotion. Emotion de Jérôme Cahuzac livrant ses confidences intimes en direct sur la face sombre de son être sur BFM TV,  émotion de la traque  du tireur fou (BFM, ITélé, LCI), émotion de la mort de Nelson Mandela (les mêmes). Un fidèle de ce blog, ulcéré par le cirque qui a suivi la disparition de Madiba (je suis comme Prévert, je dis Tu à tous ceux que j’aime, même si je ne les connais pas..) de Madiba donc, m’écrit :

« Certes, un grand homme est mort (ce qui me rappelle un dessin célèbre de Jacques Faizan). Mais tout le monde s’y attendait depuis des mois, non ? Et dans le concert de louanges qui submerge les ondes médiatiques, où est l’information, la nouveauté, la « news » ? Dans le nom des personnalités à qui l’on demande leur avis sur cette mort ? Je ne le crois pas, ce sont toujours les mêmes. D’un autre côté, on avait le début de l’intervention militaire française en Centrafrique (ce qui devrait intéresser tous les français de tous les bords politiques, ne serait-ce que pour les conversations de comptoir), un massacre en cours à Bangui (il y a du matériau médiatique là, de l’info à creuser, non?), un vote dédié du conseil de sécurité de l’ONU et des manœuvres diplomatiques (là encore, il y aura(i)t à dire), etc…

Et lors de ce journal télévisé du soir, alors que des invités choisis pour parler de l’actualité centrafricaine avaient été réunis, on leur demande tout à coup leur avis sur Mandela et sa mort, et la Centrafrique passe à la trappe. Et la réunion d’analystes qui s’annonçait peut être intéressante se transforme en logorrhée de platitudes sur le mort, sa vie, son oeuvre… Tant qu’à y être, on passe sous silence ses échecs : on est caricaturalement dans l’émotion médiatique, pas dans l’information (et encore moins dans l’analyse et la réflexion). Et cette nuit, il n’y avait rien d’autre sur BFM TV et l’autre chaîne info gratuite de la TNT (je ne me souviens plus de son nom, non que je la dénigre, mais je la suis beaucoup moins souvent). « 

Et ce même lecteur de s’interroger : « Est-ce un comportement moutonnier des rédactions, ou bien le standard du traitement de l’information, ou bien encore un « accident journalistique »?

Je n’ai, évidemment, pas de réponse à cette question. Mais je peux proposer des éléments de réflexion, ce qui me semble toujours plus intéressant que des « réponses » toutes faites.

« Sois curieux et fais-en ton métier » disait quelqu’un de célèbre – dont j’ai hélas oublié le nom- à un apprenti journaliste. Ce n’est pas très difficile de comprendre le ressort profond du journalisme, il suffit d’avoir assisté une fois dans sa vie à un événement spectaculaire et de l’avoir raconté avec empressement et force détails à son entourage. Etre journaliste c’est vouloir faire cela à titre professionnel, ressentir en permanence cette excitation, être là où des choses hors normes se passent pour filmer, photographier, témoigner, raconter.

L’adrénaline en direct

Dans la presse écrite papier, l’adrénaline journalistique est distanciée. Parce qu’il y a le temps de l’écriture, parce qu’il y a des règles (les faits, rien que les faits), parce qu’il y a le délai d’impression et enfin la distribution. Entre l’événement et sa réception par le public, il se passe au moins quelques heures (le temps nécessaire à l’écriture, l’impression, la distribution). Ce n’est déjà plus  le cas avec Internet, et l’on voit bien les risques encourus. Mais entre le « direct » télévisé développé par les chaines d’information en continu et le téléspectateur, il n’y a même plus désormais l’épaisseur d’une feuille de papier cigarette. C’est la jouissance de l’instantané. Par conséquent, le journaliste sous l’effet de l’adrénaline, se trouve en prise directe avec son public. Sans doute pense-t-il même que c’est son devoir de partager cette jouissance de l’événement en train de se dérouler ou à peine survenu avec les téléspectateurs.

De fait, vous l’aurez compris, entre une possibilité offerte par la technique et son exploitation commerciale, il n’y a qu’un pas, aisément franchi par les bienheureux qui ont été dotés à la naissance de  la bosse des affaires. Et pourquoi donc, ont dû songer ceux-là, ne pas offrir aux téléspectateurs de façon professionnelle (industrielle ?), le spectacle en direct du déroulement de l’actualité ? L’ennui, c’est que ce spectacle s’avère la plupart du temps fort ennuyeux. Le monde tourne plutôt rond, contrairement à la vision pathologique qu’en offrent les médias. Et même s’il est assez vaste pour offrir à chaque instant quelque part un sujet digne d’intérêt, les moyens limités de nos chaînes françaises les empêchent d’aller chercher cette précieuse manne à l’autre bout de la planète. Au demeurant, notre profession sait bien qu’un chien écrasé à Paris intéresse plus qu’un immeuble qui s’effondre à Bali. Que faire donc, quand on est une chaine d’information en continu, pour remplir le contrat que l’on a proposé au public, à savoir  lui servir à chaque seconde de l’événement avec un E majuscule? Eh bien utiliser les vieilles recettes du spectacle : créer des rebondissements, susciter de l’émotion, fabriquer du suspens. D’où les caméras installées là où il pourrait se passer quelque chose et les correspondants sur place commentant du vide pour soulager les experts en plateaux qui s’épuisent à débattre du rien. Et quand on n’a rien à dire ni à filmer, eh bien il ne reste plus qu’à dilater à l’infini le récit de ses émotions face à l’événement en attendant qu’un autre survienne et crée de l’émotion tout fraiche.

Tout ceci n’est pas sans incidence sur notre rapport à l’information. Le lecteur cité plus haut a raison me semble-t-il de s’interroger sur l’avenir du factuel proposé à la raison,  face au développement du spectaculaire s’adressant aux émotions. On aperçoit sans difficultés les risques d’appauvrissement intellectuel et de manipulation. Ce ne sont pas les seuls dangers. Une interview publiée hier dans le Monde de Gilles Finchelstein met en garde contre la spectacularisation de l’information qui influence le discours politique. Le spécialistes souligne toutefois  que les chaines d’info en continu ont aussi le mérite de diffuser des débats, des meetings en intégralité, des discours et  des conférences de presse autrefois réservés aux participants et aux journalistes.

Que souhaiter donc vis à vis de cette nouvelle information ? Peut-être que ses acteurs entendent le public quand il crie : stop à l’émotion dégoulinante, à la mise en scène inutile, au vide qui tourne en boucle !

14 commentaires »

  1. Si vous voulez qu’on arrête de vous vendre de la daube, c’est pourtant simple, me semble-t-il: il faut arrêter de l’acheter. Arrêter de regarder la télé (ou du moins l' »information » qu’on y trouve), arrêter de cliquer sur « like » etc. Il restera toujours un segment du marché pour ce genre de chose, et alors? Ce n’est pas comme si les médias avaient inventé le business de l’émotion avec l’arrivée d’Internet.

    Commentaire par Gwynfrid — 09/12/2013 @ 13:47

  2. Bonjour Aliocha,

    Je plussoie avec Gwynfrid. Personnellement, il y a longtemps que j’ai tourné le dos aux médias officiels (le pire étant, je crois, les chaînes d’infos continues et les prétentions des chaînes officielles. Je prendrai pour simple exemple les deux dernières boulettes de TF1, l’une sur les évènements du 11 novembre à Oyonnax et l’autre avec l’interview légèrement bidonné de Mélenchon le 1er décembre dernier: http://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/article/television/78218/hollande-hue-a-oyonnax%C2%A0-tf1-reconnait-avoir-decale-le-son.html et http://www.20minutes.fr/medias/1257907-20131202-interview-melenchon-mise-scene-tf1 ). Pour le moment et pour celui qui sait chercher, Internet offre toutes les sources requises avec autant de fiabilité, sinon plus, que la plupart des infos officielles. Il faut parfois décoder et ça demande de l’effort mais le jeu en vaut la peine. Et puis, il y a les livres qui offrent à celui qui veut et qui sait lire tous les compléments d’informations qu’il souhaite. A travers votre blog, vous contribuez à cette prise de conscience et à combattre l’évolution pernicieuse de « l’information » vue à travers l’hystérie médiatique. Vous êtes là plus près du vrai journalisme (je penses à vos papiers sur l’affaire Kerviel entre autres) que nombre de vos confrères qui confondent allègrement leur métier et l’idéologie. Attention, la désaffection et l’aversion qu’ils suscitent vont en grandissant dans ce pays. « Reste à savoir quand et comment hâter l’échéance. Pas par la violence bien sûr mais par la résistance et la désaffection. La baisse d’audience est l’arme de destruction massive de la propagande financée par le fric de la grande finance. » (http://metamag.fr/metamag-1713-Halte-a-l'hysterie-mediacratique-Mais-pour-qui-se-prennent-ils-tous-ces-journalistes–.html).

    Bonne soirée

    Commentaire par H. — 09/12/2013 @ 16:38

  3. Pour moi Aliocha c’est le siècle de la démesure et du pathos, pas celui de  » l’émotion »
    L’émotion est plus profonde plus discrète , elle est forte et intérieure et vous le dites en ce qui concerne la culture asiatique. L’émotion est durable elle vient de l’âme et ce n’est pas cet étalage où chacun en profite pour se montrer et servir aux infos les mêmes banalités.
    L’émotion est sincère .elle engendre des sentiments solides. Elle ne s’exhibe pas.
    En revanche les émotions n’ont rien de noble c’est le fait de bouger les lignes , la peur en fait partie, c’est plus proche des « sensations » multiples qui nous agitent et qui sont illustrées par les débordements dont vous parlez.
    Les journalistes jouent sur « les  » émotions c’est à dire les sensations et pas sur l’émotion parce que je crois que ce qui plait c’est le goût du story telling des sagas à rebondissements qui conduit à jouer sur le pathos qui fait pleurer Margot. Le  » populisme  » dont on parle beaucoup s’en sert dans ses discours. Certains souffrent moins en voyant le malheur des autres.
    Tout le monde s’accorde pour dire que nous sommes dans un monde très dur d’ où la compassion est absente On s’aperçoit du peu d’empathie dans toutes les sphères de la société , chacun mange son dessert sans problèmes en regardant les drames à la télévision et comme on s’habitue alors il faut de plus en plus de sensationnel pour remuer ou épater le bourgeois . Oú est l’émotion le véritable « ressenti » là -dedans ?

    Quand nous serons vraiment « émus « nous aurons d’autres médias.

    Commentaire par Scaramouche — 09/12/2013 @ 19:13

  4. la peine se mesure au silence jusqu’à la sidération.

    Commentaire par zelectron — 09/12/2013 @ 21:44

  5. « Même si vous me démolissez, vous me grandirez » a dit Sarkozy à Yasmina Reza en acceptant qu’elle le suive pendant sa campagne et s’inspire de son personnage pour écrire un livre.
    Nicolas Sarkozy n’a pas seulement compris les médias, il a compris la foule, et son irrationalité (la foule étant rendue foule par les médias).
    La foule à besoin de se réunir autour, que ce soit pour ou que ce soit contre, victime sacrificielle ou idole, homme à abattre ou homme providentiel, racaille ou saint…
    Dans ce registre nul besoin d’être raisonnable ou raisonneur ou rationnel… Seuls comptent la présence, le bruit, le spectacle… là, maintenant, à l’instant présent.
    NS l’a compris. Et ça lui a plutôt réussi (et si c’était l’abandon de cette attitude qu’il l’avait fait perdre en 2012 ?…) mais quelle défaite pour la raison, la démocratie, le bien commun !…

    Commentaire par Denis Monod-Broca — 09/12/2013 @ 22:26

  6. La France épargnante résiste à la fantaisie, à l’obscène du rêve des banques,endettez vous, osez, sinon vous ne croyez pas en l’avenir disait le sacré Sarko qui en a fait trop, de peu, 1 million de voix.Son continuateur c’est, j’attaque votre épargne courageusement, choc et sidération, l’économie c’est la guerre de tous contre tous, le reste c’est allo maman bobo, une assurance compensatoire pleine de pathos où tout est assuré contre d’innombrables risques, c’est la pub et ses multiples couches dirigée vers…..la femme et son enfant, sacré transport, comme la voiture. L’info, c’est de la pub, le médium est le massage. Bonne nuit les petits, remember.

    Commentaire par le grand jeu — 10/12/2013 @ 00:11

  7. L’affaire avait conduit Georges Tron à démissionner de son poste de secrétaire d’État à la Fonction publique en mai 2011. En juin 2012, il a perdu son siège de député, ravi par le socialiste Thierry Mandon.
    http://lci.tf1.fr/france/justice/accusations-de-viols-non-lieu-pour-georges-tron-8327468.html

    C’est bien productif,le lynchage, surtout médiatique!
    Misère, mélasse et coaltar.
     

    Commentaire par araok — 10/12/2013 @ 11:18

  8. Bonjour,

    je trouve les critiques des médias développées sur ce blog pertinentes et la quête d’une information plus riche tout à fait essentielle. Cependant, il me semble que cet article met en lumière la complexité – toujours la même chose – de ces questions et la nécessité d’une certaine humilité avant de lancer des imprécations. En effet, j’ai l’habitude de lire Aliocha dénoncer la tyrannie du direct, du « tout-de-suite », de la réaction instantanée d’experts qui sont du coup toujours les même – ceux dont on a le téléphone a portée de main. Ici, ne réclame-t-on pas des réactions immédiates, du scoop, de l’actualité, du spectaculaire en exigeant une couverture plus grande de l’actualité en RCA tout de suite ?

    Au-delà de la part de ridicule consubstantielle à ce déchaînement d’adoration pour Mandela (je conseille à ceux qui n’ont pas encore trouvé une info plus nuancée la nécrologie du Guardian), n’y a-t-il pas à un sens à trouver à cette unanimité soudaine ? Le respect, l’espoir, le partage, ne valent-ils pas de « marquer le coup » à l’occasion de la mort d’un tel homme ? Quand parler du long terme et de l’essentiel (à condition qu’on le fasse vraiment…) sinon ?

    La hiérarchie entre ces deux informations ne me paraît donc pas du tout une évidence. Il va de soi que cela n’empêche pas de critiquer les excès, le trop-plein, le vide et le manque d’analyse ; mais attention à ne pas aller trop vite en besogne…

    Jokin Vaillant

    Commentaire par Gladstone — 10/12/2013 @ 17:52

  9. A propos du « cirque  » Mandela
    Il faudrait quand même essayer de voir un peu plus loin que notre nombril au lieu de juger tout à l’aune de notre civilisation nos problèmes notre mentalité et notre vécu.
    Ainsi pour Mandela qui représente exaxtement ce qu’Antoine Glaser a la télévision a nommé très crûment un gri gri »…. Pour nous ce serait l’image, l’idole, le héros auquel les jeunes se réfèrent et que les vieux vénèrent. Pour nous ce serait l’homme providentiel. Celui qui a évité la vengeance et un bain de sang.
    Il faudrait avoir vécu l’apartheid, savoir la haine des ressentiments accumulés entre les Afrikaners et les Anglais et avoir une petite idée des luttes tribales entre noirs pour savoir que cette nation vit sur le fil du rasoir et qu’avoir réussi à calmer le jeu est un miracle du couple Mandela. .. (Et de quelques autres aussi )… Alors qu’importent les idéfauts des uns et des autres les amertumes de certains blancs cousins du Tea Party ou les litanies de nos médias , il serait bon de croiser les doigts pour que ca dure et que ça s’étende ailleurs parce qu’on n’est pas sorti du Centre Afrique où nous faisons des bourdes en prenant parti , or nous avons besoin de références de paix et c’est pour ça qu’ il faut entretenir ce mythe.

    Commentaire par Scaramouche — 12/12/2013 @ 09:35

  10. Et que dire de l’état de Schumacher et de la façon dont les médias en rendent compte !?…

    « Nous ne savons rien de nouveau, les médecins ne peuvent pas se prononcer. Tournons-nous vers notre correspondant sur place : « comment s’est passé la nuit ? »

    Le correspondant sur place qui fait le pied de grue devant l’hôpital depuis la veille au soir : « Nous ne savons rien de nouveau, les médecins ne peuvent pas se prononcer. Voici ce que le professeur XXX disait hier »

    Interview du professeur XXX de la veille : « Rien de nouveau, nous ne pouvons pas nous prononcer. »

    Et ainsi de suite..,

    Commentaire par Denis Monod-Broca — 31/12/2013 @ 08:21

  11. Si vous êtes encore par là Denis, un petit article assez intéressant.
    http://www.lemonde.fr/sport/article/2014/01/02/autour-de-michael-schumacher-beaucoup-plus-de-journalistes-que-de-supporteurs_4342068_3242.html
    Et bonne année à vous !

    Commentaire par Maelle — 02/01/2014 @ 11:19

  12. @ Maelle

    Merci du lien.
    Quelle absurdité tout ça ! C’est de l’idolâtrie à l’état pur..,
    Merci de vos vieux et bonne année !

    Commentaire par Denis Monod-Broca — 02/01/2014 @ 19:56

  13. Merci de vos vœux, excusez le lapsus

    Commentaire par Denis Monod-Broca — 02/01/2014 @ 19:57

  14. Et encore une fois on ne voit que ce qu’on veut bien nous montrer .. Tout ce ramdam autour du champion est causé par les sponsors et les assurances .. Une énorme histoire de gros sous pour savoir à qui imputer la faute .. au cas où…

    Commentaire par Scaramouche — 04/01/2014 @ 15:27


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