La Plume d'Aliocha

22/09/2014

Comment veux-tu que je t’enfume ?

Filed under: Eclairage,Mon amie la com',questions d'avenir — laplumedaliocha @ 15:04

images-3France Inter consacrait ce matin son numéro de l’émission Service public à cette passionnante question : « Comment contourner les stratégies de communication des grandes entreprises ? » . Parmi les invités, deux conseils en communication visiblement nourris au lait de bisounours depuis des années ont expliqué à quel point leur métier était utile, honnête et transparent. S’il est devenu désormais impossible pour un journaliste de parler à un décideur politique ou économique sans que celui-ci soit chaperonné par un conseil en communication c’est que l’opinion se professionnalise, de sorte que le discours aux médias doit se sophistiquer. Autrement dit le public est devenu si expert qu’il faut lui proposer des arguments experts (étrange comme on a le sentiment inverse en voyant le résultat, mais bon). On les soupçonne d’arranger la vérité ? Allons donc ! Ils ont une éthique, d’ailleurs certains refusent des dossiers quand ils n’adhèrent pas au message qu’on veut leur faire passer. Des menteurs, les communicants ? Bien sûr que non, nos kantiens en herbe ne mentent pas. Ils sont au contraire les partenaires privilégiés des journalistes, ils pallient leur manque de temps et de moyens en leur servant li’information utile qu’ils ont préalablement sélectionnée pour eux. En toute honnêteté. D’ailleurs, c’est pour ça que leurs clients leur offrent des ponts d’or : pour décrire bêtement la réalité à l’état brut, entièrement et  sans aucun maquillage.

Hélas, cette vision idyllique – qui ne convainc guère –  est démentie par les intéressés eux-mêmes dès qu’on les fait parler de dossiers concrets.  Ainsi quand le journaliste les interroge sur le cas de Richard Gasquet la réponse est saisissante. Souvenez-vous, en 2009 Gasquet est  contrôlé positif à la cocaïne. L’intéressé avoue tout en avançant une explication qui vaut son pesant de sucre en poudre : il n’a jamais pris de cocaïne, si on en a trouvé dans ses analyses, c’est qu’il a dû en absorber involontairement soit dans un verre en boite, soit en embrassant une jeune femme elle-même cocaïnée.   Patricia Chapelotte sourit à l’évocation de cet épisode ridicule, mais balaie bien vite la question du mensonge en communication : c’est le sport, et puis il y a de telles sommes en jeu…Autrement dit, allons, soyons cool, y’a pas mort d’homme.

On l’aura compris, si le discours médiatique ressemble désormais à un spot publicitaire permanent, c’est-à-dire s’il est nourri de phrases creuses et superficielles, et truffé parfois de franches absurdités – l’insupportable « part d’ombre » de Cahuzac lors de sa confession télévisée, la phobie administrative de Thevenoud etc. – c’est grâce à ces professionnels de l’argument qui tue. Sous l’antiquité, on les appelait « sophistes ». Ce sont les champions toutes catégories de l’abrutissement.

Le problème, c’est qu’ils sont sur le point de prendre le contrôle total de l’information. Un chiffre, donné en cours d’émission, exprime la gravité de la situation : aux Etats-Unis on compte désormais 4,6 communicants pour 1 journaliste. Lequel journaliste touche une rémunération inférieure de 40 % à celle du communicant et travaille avec des moyens ridicules. A voir le nombre de confrères qui annoncent leur passage à la com’ chaque année, je ne crois pas trop m’avancer en prédisant que la situation ne va faire que s’aggraver.

Notre métier est en danger si nous n’avons pas le temps de l’exercer, confie un confrère dans l’émission. Je crains que même en se donnant le temps, cela ne change rien à la catastrophe qui s’annonce.

Pour preuve, le dossier Kerviel justement abordé dans l’émission par son ex conseillère en com’ Patricia Chapelotte. Celle-ci décrit encore, 4 ans après la première condamnation de l’intéressé en correctionnelle, le petit breton bouc-émissaire d’un système cynique. A la trappe l’instruction par Renaud Van Ruymbeke ! A la trappe les deux procès au fond et la décision de la Cour de cassation ! Tout ça ne pèse rien face à la légende médiatique du petit breton victime de la méchante banque. Il faut dire qu’on a tous tellement envie d’y croire à cette belle histoire. La force de la communication, c’est qu’elle ne s’embarrasse pas de vérité, avec ses nuances, ses zones d’ombre et ses complexités, elle impose la légende susceptible d’entraîner l’adhésion du public. Légende qui généralement appuie sur les mécanismes les moins fiables du cerveau, le biais de confirmation, la quête d’une explication facile et autres travers remarquablement décrits dans un ouvrage incontournable : la démocratie des crédules, par Gérald Bronner.  

Dans l’affaire Kerviel, quelques médias commencent à avoir la gueule de bois et enquêtent sur l’enfumage dont ils ont été victimes. Je recommande à ce sujet le très bon reportage du Petit Journal diffusé en mai, ou encore celui de France 5 (vidéo le magazine reportage 1) qui date d’hier.

Mais, comme dirait la chroniqueuse judiciaire du Monde Pascale Robert-Diard dans le remarquable papier où elle a démonté la com’ Kerviel le lendemain du cirque à Vintimille, que pèse tout ceci face à un Goliath médiatique ?

Rien. L’information n’a plus assez de moyens pour se faire entendre, elle arrive trop tard, elle n’est pas séduisante, bref, elle est has been.

Les communicants sont nés pour rééquilibrer le rapport de force entre les individus ou les entreprises et la puissance des médias. Le résultat dépasse leurs espérances : ils ont triomphé. Mais chut ! C’est le secret le mieux gardé au monde. Si le public s’aperçoit que le système médiatique est totalement pollué par ces arrangeurs de vérité professionnels, tout s’effondre.

Comment ? Vous pensez que ça s’effondre déjà ? Je crains hélas que vous n’ayez raison…

Note : merci au fidèle lecteur de ce blog qui m’a alerté sur l’émission par mail ce matin. 

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25 commentaires »

  1. il n’est pas besoin d’avoir un rapport de force journaliste / conseiller en comm’ défavorable, la dépendance des médias vs. les annonceurs + la puissance publique suffit à faire du médiocre et du partisan.

    Commentaire par remseeks — 22/09/2014 @ 15:16

  2. Pour paraphraser un livre puis un documentaire assez anciens, je dirais que nos amis de la com’ sont « les (nouveaux) chiens de garde » des grandes entreprises et autres.
    Avant, « les chiens » étaient aux ordre du pouvoir institutionnel, maintenant, ce sont les entreprises.
    La com’ a remplacé la philosophie.
    La preuve que l’axe du monde a changé.
    Cela aussi est une mauvaise nouvelle.

    Commentaire par fultrix — 22/09/2014 @ 17:45

  3. « La force de la communication, c’est qu’elle ne s’embarrasse pas de vérité, avec ses nuances, ses zones d’ombre et ses complexités, […] »
    Certes. Mais qui s’embarrasse encore de vérité ? Qui croit encore à la vérité ?
    Toi tu as ta vérité, moi j’ai la mienne, et puis voilà ! C’est ça la croyance à la mode. C’est sur ce terreau que la com’ prospère.
    S’il n’y a pas de vérité tout est mensonge. Et que le plus gros gagne !…
    Sans doute la vérité est-elle indéfinissable et inaccessible mais comment aller dans sa direction, comment s’en approcher, si on ne croit pas en elle ?

    Commentaire par Dénis Monod-Broca — 22/09/2014 @ 18:17

  4. En somme, tout le monde barbote dans le bain du mensonge. Et la com, utilisée par les uns et par les autres, y compris par une justice qui s’offre aux idéologies du moment, brasse du mensonge, de la manipulation et une inquiétude sournoise. C’est le sophisme dans toute sa splendeur, l’utilisation d’une rhétorique à la seule fin de berner celui qui vous écoute.
    Je ne sais plus quel philosophe expliquait que les sophistes confondaient le Bien et le bonheur, ainsi que le Mal avec le malheur. Nous y sommes !
    Ne vous étonnez pas, après cela que Marine Le Pen se frotte les mains. Je suis étonnée de la parole du français de base (des bouseux comme pense tout le monde politique) qui se libère et affirme qu’elle va voter FN.

    Commentaire par Dorine — 22/09/2014 @ 18:56

  5. @remseeks : oui, mais ce sont d’anciennes allégeances, les nouvelles sont celles dédiées à a société de consommation évoquées par Fultrix
    @Fultrix : le dieu marché, évoqué par le philosophe DR Dufour (aucun lien avec moi, je ne le connais même pas) que je ne recommanderai jamais assez !
    @Denis Monod Broca : hélas, ce relativisme imprègne les médias, c’est un de mes sujets de réflexion en ce moment. Je tends le micro au patron du medef puis au patron de syndicat et je laisse l’auditeur se débrouiller. Oui, mais ensuite ?
    @Dorine : la justice peut parfois s’égarer, mais il me semble que les règles qui l’encadrent et même l’enserrent, la protègent de bien des errances. Quand j’entre dans un prétoire, je respire bien plus de vérité que lorsque j’écoute un journal télévisé, et pourtant on ment beaucoup devant la justice 😉 Pour MLP, hélas, oui.

    Commentaire par laplumedaliocha — 22/09/2014 @ 19:29

  6. @ Denis Monod-Broca :

    « S’il n’y a pas de vérité tout est mensonge. Et que le plus gros gagne !… »

    On y est en plein, mais gardez espoir, car je reste convaincu que la fin de ce système est plus proche de nous que nous ne l’imaginons.

    On cherche à nous river à un quotidien sans fin, pauvres albatros aux ailes de poulets, aux gestes étriqués et aux cerveaux-estomacs… comme la chanson est prémonitoire !

    Mais le serpent de la com’ se mord la queue, et il finira par se dévorer lui-même. Il ne peut abolir le temps, tout au plus tirer les rideaux le plus longtemps possible, pour nous empêcher de voir au-dehors.

    Gardez espoir.

    Allez, pour ceux qui ne connaîtraient pas, voici les paroles :

    « La Peur », de Bernard Lavilliers.

    La peur a une odeur de carnaval cru
    Que des allemands rasés contemplent des terrasses
    Ils laissent louvoyer ce serpent de la crasse
    Son poignard de bronze contre sa cuisse nue

    Alors l’enfant métis le plus pauvre qui danse
    Ouvre ses yeux dorés et mesure la distance
    Qui sépare le balcon du serpent pailleté
    Les masques grimaçants des têtes pommadées

    La peur porte le temps vissé à son poignet
    Ce batteur d’acier discret comme un indic
    Te ramène au bercail quand parfois tu la quittes
    Pour affronter la mort qui est sa sœur de lait

    (refrain)

    L’avenir est un chien crevé sous un meuble
    Sentir que c’est pas tout noir, qu’c’est pas tout blanc
    Se dire qu’y a pas qu’les bons et les méchants
    Savoir que c’est pas tout blanc qu’c’est pas tout noir

    La peur a un visa ancré sur le futur
    Elle s’insinue en toi comme de la poudre pure
    Elle perce tes poumons d’une lame de fer
    Et épaissit le sang qui bat dans tes artères

    Elle rive au quotidien des milliers d’albatros
    Aux ailes de poulet gavé de poudre d’os
    Aux gestes étriqués aux cerveaux-estomacs
    Qui trottinent sur le bitume de l’au-delà

    (refrain)

    L’avenir est un chien crevé sous un meuble
    Sentir qu’c’est pas tout noir, qu’c’est pas tout blanc
    Se dire qu’y a pas qu’les bons et les méchants
    Savoir qu’c’est pas tout blanc qu’c’est pas tout noir

    La peur tire tes volets vers les huit heures du soir
    Et renforce tes gonds et ferme tes couloirs
    Dans le silence humide où la télé allume
    Son œil unique aux reflets bleutés dans la brume

    Elle te ferme la gueule quand on te remercie
    Pour service rendu Travail Famille Patrie
    Elle te glace le ventre quand on te licencie
    Et que tu restes nu Chômage Cellule Parti
    L’avenir est un chien crevé sous un meuble
    Sentir qu’c’est pas tout noir, qu’c’est pas tout blanc
    Se dire qu’y a pas qu’les bons et les méchants
    Savoir qu’c’est pas tout blanc qu’c’est pas tout noir

    La peur gaine de cuir et s’écrit  » no future  »
    Mais vend ses barbelés au mètre sur mesure
    Tu ne dis pas  » Je t’aime  » quand elle te déshabille
    Tu la baises quand même juste derrière la grille

    Elle réduit au confort tes désirs d’aventure
    Et taxe tes envies de passion et d’air pur
    C’est l’indice d’écoute branché sur le cerveau
    C’est 1933 en place pour le show

    (refrain)

    L’avenir est un chien crevé sous un meuble
    Sentir qu’c’est pas tout noir, qu’c’est pas tout blanc
    Se dire qu’y a pas qu’les bons et les méchants
    Savoir qu’c’est pas tout blanc qu’c’est pas tout noir

    La peur
    La peur c’est le corbeau penché sur le devoir
    C’est du papier monnaie contre du désespoir
    C’est de la dérision face à la misère noire
    C’est depuis le début le chantage du Pouvoir

    Voili, voilou….. 😉

    Commentaire par Zarga — 22/09/2014 @ 21:42

  7. @ Aliocha :

    C’est marrant, votre marmotte qui plie le chocolat dans le papier (vous savez comment elle fait, hein ? 😉 ), elle me renvoie à celle du film « un jour sans fin »…

    Vous saisissez le parallèle ?

    On nous enjoint de jouir sans entraves, on nous l’ordonne, sous peine de se voir relégué je ne sais dans quelles limbes, purgatoire du monde terrestre… on nous vend un « maintenant » perpétuel, on nous somme de vivre dans un Hic et Nunc, mais avec un Ego qui remplit tout le champs…

    Ouaip, bien vu, la marmotte !

    Commentaire par Zarga — 22/09/2014 @ 21:50

  8. Est-ce que l’émission « Service public » a décidé d’opérer un virage à 180 degrés ? Le thème de l’émission est assez étonnant lorsqu’on se souvient qu’il y a peu elle était animée par une spécialiste des ménages et du mélange des genres, Isabelle Giordano, la honte de la profession de journaliste. Cette dame se permettait, alors qu’elle animait une émission de défense des consommateurs, de faire des ménages pour des sociétés du CAC 40, allant même jusqu’à faire la promotion à l’antenne d’une des sociétés pour laquelle elle cachetonnait.
    Voir ici : https://www.youtube.com/watch?v=BLJcz0a3UwY
    Aliocha a raison de pointer la puissance des communicants, mais s’ils ont triomphé, comme elle dit, c’est en grande partie en raison de la démission des journalistes (pour ne pas parler de complicité ou de compromission).

    Commentaire par Gilbert Duroux — 22/09/2014 @ 22:02

  9. […] France Inter consacrait ce matin son numéro de l’émission Service public à cette passionnante question : "Comment contourner les stratégies de communication des grandes entreprises ?" . Parmi les invités, deux conseils en communication visiblement nourris au lait de bisounours depuis des années ont expliqué à quel point leur métier était utile, honnête et transparent. S’il est devenu désormais impossible pour un journaliste de parler à un décideur politique ou économique sans que celui-ci soit chaperonné par un conseil en communication c’est que l’opinion se professionnalise, de sorte que le discours aux médias doit se sophistiquer. Autrement dit le public est devenu si expert qu’il faut lui proposer des arguments experts (étrange comme on a le sentiment inverse en voyant le résultat, mais bon). On les soupçonne d’arranger la vérité ? …  […]

    Ping par Comment veux-tu que je t'enfume ? | Chronique d... — 23/09/2014 @ 07:53

  10. @fultrix

    « La com a remplacé la philosophie »
    C’est le nouveau credo
    La com comme toute manipulation règne d’autant plus que l’être humain n’est pas éduqué ne sait pas faire un choix, n’apprend plus à penser, et que son expression est limitée .
    Intéressant le nouvel éclairage sur Michel Onfray dans Marianne …

    Commentaire par Scaramouche — 23/09/2014 @ 09:14

  11. Votre acharnement contre J.K. est troublant. Il a reconnu de lui même toutes les fautes qui lui sont reprochées, mais il n’a pas détourné un euro à son profit. Pourquoi donc avoir pris tous ces risques ?
    Pour ma part je ferai un parallèle avec l' »affaire d’Outreau ». Le juge Burgaud a fait mettre en détention 18 personnes avec l’approbation de toute sa hiérarchie…et pourtant il ne faisait que du zèle pour lancer sa carrière : il a brisé des vies, mais tant que ça n’est pas du fric, ça n’est pas grave ! Je pense que J.K. pour réussir, pour remplir les objectifs, a eu la même démarche : tricher, tricher toujours tricher pour se faire mousser, pour remplir des objectifs imbéciles et inatteignables. Tant que ça marche, que ça marche très bien, personne ne se pose de questions, surtout pas la hiérarchie (trop contente d’empocher la gloire ou le bonus des tricheries) et puis un jour : catastrophe, un grain de sable vient enrayer la presque parfaite mécanique frauduleuse. Alors là tout le monde s’offusque : comment a-t-il pu oser ? Il a tout simplement osé ce que vous vouliez qu’il ose…à condition de ne pas perdre, de ne pas se faire prendre la main dans le pot !
    Tous les jours des chauffeurs-livreurs roulent à des vitesses excessives pour respecter les délais qui leur sont impartis par leurs employeurs : s’ils n’y parviennent pas…c’est le renvoi ! Sils ont un accident ce sont eux qui iront devant les tribunaux pour répondre de leur faute…je ne connais pas d’exemple où l’employeur vienne défendre le chauffeur en disant qu’il avait simplement tenté de réaliser les objectifs…
    Lance Amstrong a été un « héros » adulé par tous (media, institutions officielles y compris), ceux (lucides et compétents) qui dénonçaient ses tricheries étaient moqués, traité d’aigris, d’esprits chagrins…et pourtant, le grain de sable a fini par révéler l’ampleur de la tricherie et du système de fraude et corruption qu’il avait mis en place.
    Ca ne fait pas de J.K. un saint, mais j’ai tendance à penser que ce qu’il a fait est moins grave que de faire perdre la vie à un être humain, pour respecter un horaire de livraison…

    Commentaire par Bonnet Francis — 23/09/2014 @ 10:20

  12. […] France Inter consacrait ce matin son numéro de l’émission Service public à cette passionnante question : "Comment contourner les stratégies de communication des grandes entreprises ?" . Parmi les invités, deux conseils en communication visiblement nourris au lait de bisounours depuis des années ont expliqué à quel point leur métier était utile, honnête et transparent. S’il est devenu désormais impossible pour un journaliste de parler à un décideur politique ou économique sans que celui-ci soit chaperonné par un conseil en communication c’est que l’opinion se professionnalise, de sorte que le discours aux médias doit se sophistiquer. Autrement dit le public est devenu si expert qu’il faut lui proposer des arguments experts (étrange comme on a le sentiment inverse en voyant le résultat, mais bon). On les soupçonne d’arranger la vérité ? …  […]

    Ping par Comment veux-tu que je t'enfume ? | Autres V&ea... — 23/09/2014 @ 10:30

  13. @ Gilbert Duroux :

    ça fait un moment que « Service Public » a changé. Miss Giordano est parti sous d’autres cieux, remplacée par Guillaume Erner. On y a gagné au change, vous ne trouvez pas ?

    Commentaire par Zarga — 23/09/2014 @ 16:57

  14. @ Zarga
    Oui, c’est ce que je remarque. Ce qui est quand même troublant, c’est que personne (à part peut-être Acrimed) n’a relevé l’énorme contradiction qu’il y avait entre le fait d’animer une émission de défense des consommateurs et toucher du pognon, beaucoup de pognon, de la part de ceux qui enfument les mêmes consommateurs).
    À propos des connivences soigneusement entretenues entre les mondes politique et journalistique, cet extrait du bouquin « Bien entendu… c’est off », de Daniel Caton (journaliste politique au Monde à l’époque), qui traitait avec force détails les universités d’été devenues « des ateliers de formation au copinage » :
    « Universités parce qu’il s’agissait de former les jeunes de ces partis à la politique. D’été parce que la trouvaille était de leur faire prolonger, à prix cassés, leurs grandes vacances dans un endroit des plus agréables […] Le concept a vite dégénéré. Les jeunes ne devinrent plus que des figurants dans un décor monté pour les premiers tours de chant de rentrée des ténors de l’écurie. L’ambiance devint de moins en moins studieuse, de plus en plus estivale et disons familiale. Enfin, ces universités d’été devinrent de formidables pièges à journalistes […] Ces universités d’été pourraient être sponsorisées par le Club Med, Trigano ne se retournerait pas dans sa tombe. Tout y garantit du bon temps […] Très tard, ces journées de grandes réflexions s’achèvent en boîte sur des rythmes endiablés ou langoureux, avec pénombre intime. Car pour être politique ou journaliste, on n’en est pas moins homme ou femme.[…] On peut résister bien sûr. Demander à loger à l’extérieur du club, s’en sortir par des pirouettes, mais les traquenards sont partout. […] Progressivement, perfidement, ces lieux sont devenus des ateliers de formation au copinage, avec multiples séances de rattrapages pendant l’année. Car les politiques ont compris quels avantages ils allaient en tirer et ils ne se sont pas arrêtés. Le malheur des journalistes a été de ne pas réaliser quelle part d’eux-mêmes ils allaient y laisser. »

    Commentaire par Gilbert Duroux — 23/09/2014 @ 18:14

  15. @ Gilbert Duroux :

    Ce qui me gênait le plus chez Isabelle Giordano, c’était le côté approximatif… comme quoi, il y a bien un monde entre une animatrice et une journaliste.

    Commentaire par Zarga — 23/09/2014 @ 20:58

  16. Pour expliquer la médiocrité des journalistes d’aujourd’hui, le point de vue d’Obertone exposé dans son prochain livre apportera quelques éclaircissements complémentaires.

    Commentaire par lethuiller — 24/09/2014 @ 12:03

  17. Pour le dire abruptement je hais la com’, ce mélange entre propagande et publicité, qui prend avant tout ceux à qui elle s’adresse pour des cons. Quel meilleur exemple que l’affaire Kerviel !

    Bon, maintenant, la com’ c’est avant tout un discours, le fameux storytelling si je ne me trompe. Alors – là encore c’est sans doute un peu simpliste de ma part – la voir, la décoder, ne pas tomber dans ses pièges, c’est avant tout un problème d’éducation, à la fois de la part du système scolaire (par l’analyse des textes littéraires, historiques, philosophiques … dès que l’enfant est en âge de comprendre) et des parents qui doivent alerter les enfants à ne pas être dupes des messages qu’ils reçoivent (notamment la pub).
    Si tous les citoyens avaient su développer un esprit critique (un certain cynisme?), la com’ ne marcherait pas, pis encore elle aurait des effets contraires au but recherché.
    Je vous assure qu’en tant que parent c’est quelque chose à laquelle j’attache une très grande importance.

    Commentaire par Maelle — 24/09/2014 @ 12:10

  18. @ Maelle :

    Même si je suis d’accord sur le fond, je pense qu’il faut aussi entretenir une certaine forme d’intuition. Point n’est besoin d’avoir reçu une instruction particulièrement solide à l’école, nous sommes tous suffisamment intelligents à la base pour ne pas tomber dans les panneaux les plus grossiers.
    Il suffit souvent de cultiver son côté « aware » (comme dirait JCVD, The Muscles From Brussels! 😉 ).

    C’est quand ça devient technique que ça peut se corser… comme nous l’a montré récemment Aliocha, à propos des insinuations de David Koubbi concernant les pseudo-deals secrets destinés à acheter le silence de certains.

    Le démontage technique de notre hôtesse était d’une simplicité lumineuse, et je l’en remercie encore. Mais là, le bagage technique est nécessaire pour dissiper le nuage de fumée.

    Pour le reste, il nous faut lutter contre notre penchant pour les histoires, les contes, le suspense… parce que c’est ce qui nous est servi à chaque fois.

    La phobie administrative pour l’un (le monachisme lui tend les bras, à ce pauvre garçon, s’il souhaite échapper à cet hydre), la cabale pour l’autre (l’ancien-futur-ancien, qui enchaine les campagnes électorales, soit comme directeur de campagne, soit comme candidat lui-même, et qui n’est jamais au courant de rien… ça sent l’emploi fictif, tout ça! 😉 ) ou encore la part d’ombre (Half and Half… il faut qu’il arrête de lire Batman, c’est tout).

    Commentaire par Zarga — 24/09/2014 @ 16:21

  19. Je parlais plus haut de démission des journalistes face aux communicants. Faut dire qu’ils ne sont pas souvent aidés par leur hiérarchie. 45 minutes pour Sarkozy sur l’antenne dont il a nommé le PDG, pas une minute pour évoquer les extraits de l’audition de Sarkozy par la PJ (alors que Libé y a consacré deux pages et France Inter de larges extraits). Les syndicats de France Télévisions, dénoncent la censure :
    http://www.20minutes.fr/television/1449055-20140924-france-3-censure-sujet-garde-vue-nicolas-sarkozy

    Commentaire par Gilbert Duroux — 24/09/2014 @ 17:02

  20. @Zarga

    Montrer à un enfant les ficelles assez visibles derrière les publicités sur les céréales, les jouets etc, ca ne peut pas faire de mal, non ? Développer l’esprit critique, on pourrait aussi, apprendre à penser par soi-même, devrait être un des fondements de l’éducation, à quelque niveau que ce soit, mais je crains que cela ne soit peut-être trop subversif …

    Là où je pense vous avez parfaitement raison, c’est qu’on a tous un penchant naturel à croire aux belles histoires, à ajouter du merveilleux ou encore à monter des théories complotistes délirantes. C’est tellement plus rigolo, sexy que la triste réalité, et puis on a l’impression d’être intelligent, de comprendre ce qui se passe derrière, alors qu’en fait le cerveau tourne à vide. On a souvent évoqué ici ce phénomène pour l’affaire Kerviel. I want to believe, comme dirait Fox Mulder.

    Moi aussi, j’ai adoré le concept de « phobie administrative » !

    Commentaire par Maelle — 24/09/2014 @ 17:19

  21. Vous avez raison, Maëlle, il faut apprendre à l’enfant à prendre du recul. Mais les programmes de l’éducation nationale et le tout visuel véhiculé par les médias, ne donnent plus à l’enfant le recul nécessaire pour faire appel à une conscience, à une culture transmise ou à une éthique.
    Je pense que pour avoir un minimum de recul, il faut un minimum de culture ou une bonne dose de bon sens que l’on peut acquérir au contact du réel et de la nature (parce que dans ma zone rurale, les paysans savent se faire une idée de se qui se passe autour d’eux sans avoir besoin de philosophes ou psychanalystes).
    En définitive, la génération 68 a castré les jeunes cervelles par cynisme ou inconscience, peu importe, le résultat est là !

    Par ailleurs, je pense que agir selon une éthique ou une conscience est ce qu’il y a de plus difficile dans la vie professionnelle. Je me pose souvent la question des ficelles que les labos utilisent pour vendre leurs médicaments aux médecins. Et nous sommes souvent assez naïfs pour tomber encore dans le panneau. Déchiffrer le besoin commercial et l’intérêt financier dans les communications faites par nos pairs et soufflées par les labos, il faut beaucoup de souffle….. Il nous a fallu beaucoup d’années pour réaliser que les statistiques faites par beaucoup de labos sur nos études de médicaments étaient systématiquement biaisées par les labos. Je suppose que la justice a aussi ses failles et peut tomber dans le mensonge éhonté plus facilement qu’on ne croit, malgré les gardes fous comme le rappelle Aliocha..

    Alors, si ce n’est pas facile pour les adultes, combien est-ce plus difficile pour des jeunes qui essaient de se raccrocher à quelque chose de vrai à croire.

    @ Zarga : c’est très joli le merveilleux et ça permet de souffler un peu sur le chemin ardu de la vie. Les théories complotistes ne prennent que sur du vide et du non sens. Donnez du sens à l’existence et vous verrez que les jeunes désœuvrés n’auront plus besoin de s’échapper dans du tout cuit, dans le gavage d’images ou dans le djihad….

    Commentaire par Dorine — 24/09/2014 @ 20:17

  22. @ Dorine :

    Je ne fustige pas le merveilleux pour ce qu’il est, ni pour ce qu’il apporte (que vous résumez joliment).
    Je dis juste qu’on nous sert des histoires, comme le dit Maelle. Elles sont souvent hénaurmes (comme le dit Denis Monod-Broca) et les plus abracadabrantesques sont celles qui passent le mieux… Quelle misère!

    Le merveilleux est très joli, en effet, surtout quand on arrive encore à le voir dans le plus petit détail du quotidien. Un des secrets du bonheur, ai-je lu quelque part, c’est de continuer à désirer ce que l’on a déjà.

    Pour ce qui est de l’école… un épisode du feuilleton, pour vous : prenez un élève de quatrième, qui étudie les figures de style (métaphore, antonomase, etc…) et qui ne veut plus se servir d’un dictionnaire papier (c’est gros, c’est lourd !). Merci Internet !

    Mais voilà : comment faire quand on se retrouve paumé devant le flot que Wikipedia met à votre disposition ?
    Moi, avec mon « Lexis » un peu vieillot, ben je débusque toutes les antonomases que l’on cache dans une liste de mots, et en deux coups de cuiller à pot !

    Pantalon, praline, reine-claude, sandwich… pas une ne m’échappe !

    Mon dico papier a repris un peu de lustre… jusqu’au prochain épisode.

    C’est usant, mais il ne faut pas lâcher.

    Commentaire par Zarga — 24/09/2014 @ 21:38

  23. @ Maelle :

    « Montrer à un enfant les ficelles assez visibles derrière les publicités sur les céréales, les jouets etc, ca ne peut pas faire de mal, non ? »

    Bien sûr, je plussoie !

    Je voulais juste dire que dans bien des cas, on sent une pointe de malaise à l’écoute du mauvais cinoche que nous servent les communicants, et ce sans pour autant avoir étudié la discipline.

    Mais oui, dix fois oui, il faut pointer du doigt les ficelles qu’utilisent les publicitaires pour éclairer les petits lampions de nos enfants.

    En mon for intérieur, je tiens ces gourous du marketing pour ce qu’ils sont : des pornocrates, qui ne veulent qu’une chose : étendre la marchandisation au plus près de la personne, de son être, que ce soit sa chair ou son esprit. Ils ne valent pas beaucoup mieux que tous ceux qui nous fourguent leur histoires de fesses sous le nez pour un oui ou pour un non.

    Commentaire par Zarga — 24/09/2014 @ 21:44

  24. aucun rapport… quelqu’un a-t-il remarqué que nous avons passé l’été à l’heure d’hiver dans le salon d’Aliocha ?

    Commentaire par Zarga — 24/09/2014 @ 21:46

  25. Puisqu’il est de bon ton ici de taper sur kerviel, et en même temps de citer des bons films, je vais faire un lien foireux. Re(re)garder l’affaire Von Bullow. Ce qui me hérisse dans l’affaire kerviel, c’est que le plaignant à fait son enquête, à désinfecter la scène du crime pendant 1 semaine(15 jours?), à fournis les enregistrement incriminants obtenus sans avocats, à décidé tout seul quel est le préjudice (à tel point que les erreurs d’additions sont repris tels quels dans le travail de la justice) et que cela ne choque personne.

    Peut être que kerviel est un maichant,mais j’aurais voulu qu’un enquête vraiment indépendante le détermine. Mais ce n’a pas été le cas. C’est comme pour les médicaments et les vaccins et les ogm : ce sont les producteurs qui donnent les infos et ils faut les croire. Alors tout ce petit cirque vous va bien, mais dès que ce sont des communicants qui fabriquent de l’info cela ne vous va plus. Ou est la différence ? j’aimerais bien savoir.

    Enfin, absent depuis une éternité ici bas, j’ai relus une pelle de billets et de commentaires, cela n’a pas changé, une petite communauté qui défend ce qu’elle pense contre les autres. C’est cela le plus grave, le net pourrait (aurait pu être ) un fantastique réservoir à réflexion, il n’est devenu qu’une immense pétaudière de balkanisation, ou la défense de ses idées et de son groupe passe bien avant la réflexion.

    Ce qui existe dans la presse est passé sur le net. #fin_d’un_espoir

    Commentaire par herve_02 — 26/09/2014 @ 00:23


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